• 7 octobre '14 - Deux jours, une nuit ou la décision cruelle d'un employeur

    Il est facile d'être solidaire quand on n'est pas dans la misère...

    C'est en gros l'enseignement que je tire du film Deux jours, une nuit.  

    7 octobre '14 - Deux jours Une nuit ou la décision cruelle d'un employeur

    Sandra a souffert d'une maladie de longue durée.  Son absence s'est fait sentir.  Ses collègues ont été amené-es à travailler davantage (3 heures supplémentaires par semaine).  Puis, Sandra revient.  Son employeur demande alors à ses employé-es de voter.  Soit Sandra conserve son emploi et personne ne touche la prime de 1000 euros, soit tout le monde touche sa prime mais Sandra est licenciée.  

    Le film commence un vendredi.  Le vote décisif a lieu lundi matin.  Sandra a deux jours pour convaincre ses collègues.

    A la lecture de ce résumé : soit on garde une collègue et on n'a pas sa prime; soit on licencie une collègue et on a sa prime, j'étais imprégnée de jugements faciles et hâtifs.

    Allez, quoi, on sait déjà où va le / la  gentil-le: c'est celle / celui qui accepte de renoncer à un gain par solidarité.

    Sauf que les Dardenne montrent comme ce choix n'est pas aisé lorsqu'on cumule les petits boulots au noir, ou lorsque sa femme est au chômage et que 1000 euros, cela paie le gaz et l'électricité pendant un an...

    J'ai pleuré du début à la fin.   Je n'osais pas regarder mon homme, de peur qu'il se demande pourquoi les larmes ne cessaient de tomber (il sait comme je suis vite prise dans l'émotion d'un film / livre)...alors qu'autour de moi, j'ai eu l'impression de peu d'émotions.  Mon chéri m'avouera plus tard qu'il était dans le même état que moi (sauf que je ne l'ai pas entendu se moucher, lui).  

    Dès les premières minutes du film, j'ai été happée par l'émotion et la fragilité de Sandra.  Elle se croit nulle, pas à la hauteur.  Son mari, soutien indéfectible, la corrige: tout le monde aurait craqué dans sa situation.  Tomber malade (de dépression en plus), se soigner, revenir au travail et quasi recevoir son C4, c'est d'une violence telle que tout un-e chacun-e aurait craqué.  Elle, Sandra, tient le coup (à coup d'anti-anxiolytiques certes, mais), elle est debout et agit pour sa cause. 

    Evidemment, la violence de la décision du film a fait écho avec la violence dont j'ai été victime.  Elle m'a donc frappée en pleine figure.  Pour le reste, nos situations de vie sont très différentes, si ce n'est la présence et le soutien d'un mari courageux et bienveillant.

    J'ai aussi beaucoup aimé le choix du personnage de Sandra.  Marion Cotillard campe une héroïne fragile, peu sûre d'elle-même, découragée, dépressive...loin du cliché de la syndicaliste pleine de hargne et de conviction.  Sandra elle-même, on le comprend à son comportement, aurait hésité devant un tel choix.   Elle comprend d'autant mieux ses collègues, que dans leur situation, elle n'aurait peut-être pas opté pour la solidarité.

    Ce film rappelle aussi comme chaque voix compte.  Et, surtout, comme une voix peut être source d'espoir.  Alors que le désespoir la gagne au plus haut point, le soutien d'une personne provoque chez elle un déclic net; une conviction que le combat vaut la peine d'être mené.  

    La morale des frères Dardenne réside en cette leçon: au final, c'est cela qui compte;  le fait de conduire cette lutte.  Sandra en retirera une fierté et une force telles qu'on l'imagine y puiser l'énergie nécessaire pour continuer son chemin de vie.

    Enfin, pour une critique plus complète, je vous renvoie à cet article de alterinfo.net  Je partage l'étonnement de cette critique face à l'absence de voix syndicale.  En même temps, je tempère. Dans les petites sociétés, j'imagine sans peine que les syndicats sont, la plupart du temps, inexistants.

    Pour ma part, je m'étonne du peu de remise en question de l'attitude du patron qui a clairement fait le choix d'imposer une choix impossible à ses salariés.

    Un film à voir et à commenter!  Il mériterait d'être suivi d'un débat circonstancié sur les conditions de travail des salariés.

    PS [édit du 10 octobre 2014]: Je ne partage pas l'interprétation de la critique d'alterinfo pour qui la prime = en réalité à la rémunération des heures supplémentaires.  Ce n'est pas ma lecture du film.  La prime de 1000 euros pour tous, sauf pour un qui est le dernier à avoir été engagé, est un bonus, un supplément du salaire.  Si le combat portait sur la rémunération des heures payées, il eut fallu être encore plus radical!  Les heures prestées doivent être payées!  Et Sandra doit conserver son emploi!  Un tel chantage (la rémunération des heures supplémentaires ou Sandra) n'a pas lieu d'être.  Il n'a pas le droit d'être.  Ici pour la prime, le bonus, à partir du moment où l'entreprise est en difficulté, sa "légitimité" peut encore être discutée, selon moi.

     

     

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