• Les choix d'éducation

    "[C]eux qui veulent lutter contre les forteresses de pouvoir qui dominent notre société ne doivent pas hésiter à combattre la professionnalisation technocratique de l'enseignement qui, sous tutelle centralisatrice de l'Etat, aboutit à la destructuration de la culture en séparant les connaissances de l'usage social qui en est fait.  Et c'est par ce biais et nul autre que non seulement se confirme davantage encore la soumission du culturel au socio-économique, mais que se diffuse aussi l'expérience où le fait d'aller à l'école manque de plus en plus d'un sens véritable".

    A. BASTENIER, "La liberté d'enseignement : un droit à réinterroger", La Revue Nouvelle, 1998, n°10, p. 28*.

    Licence PaternitéPas d'utilisation commerciale Certains droits réservés par Hannap (Flickr.com)

    * Réponse à l'article d'Albert Bastenier: un article de Jean-Emile CHARLIER, publié dans la même revue.  Même constat, mais proposition de solution différente.

     

    Et voici une vidéo dont je recommande le visionnage:

     

  • Encore quelques photos d'EOS.  Ici lors d'un anniversaire (pour l'histoire, c'est ici).

    L'enfant de lumière avec les étoiles, le soleil, la lune et le grand ange et le petit ange

    Les enfants de la terre

    Les enfants en plein jeu libre

    ***

     


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  • Je viens de vendre ce trio à Olga pour le jardin d'enfants.  J'ai toujours pensé que c'était une créations très didactique et qu'elle avait toute leur place dans une école.


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  • Et pour le plaisir des yeux, la table de saison d'Olga

     

    Cette poupée représente la Vie

     

     

     

     

     

    *** 

     


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  • Comme vous le savez, je participe aux ateliers poupées les mercredis soir à l'école EOS, avec Betty.  

    Mercredi dernier, j'ai pris mon appareil photo.  La table est présidée par Betty. Ce jour-là était consacré au personnage fleur pour les tables de saison.

     

     

    Voici la primevère de Cristina

     

     

    Ici la jonquille d'Elodie, je pense, ou de sa maman

     

    Olga en plein travail

     

     

    Voici les modèles confectionnés par Betty

    Voici la mienne que j'ai terminée le lendemain, tranquillement chez moi.  Lors des ateliers, je parle trop...je n'avance pas beaucoup avec mes mains he

    La belle sans ses cheveux

    10 mars '15 - Atelier poupées: des doudous et personnages fleur

     

    10 mars '15 - Atelier poupées: des doudous et personnages fleur

    J'en profite pour montrer un des doudous que j'ai achevé mercredi dernier.  En fait, c'est plutôt Betty qui l'a terminé en dessinant les yeux, la nez et la bouche avec les crayons aquarelles.

     

    Et voici celui que j'ai terminé à la maison le lendemain.  Betty m'a sérieusement aidée pour les mains. Je ne sais pas ce qui m'a pris, mais le corps du doudou n'est pas du tout aux bonnes dimensions.  Les bras sont disproportionnés.  Et j'ai eu un mal fou pour les mains, de sorte que c'est Betty qui a finalement décousu la belle main que j'avais fièrement cousue pour en recoudre deux aux dimensions correctes.

      

    J'ai éprouvé beaucoup de plaisir !  Et énormément de fierté en prime!


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  • Suite de mon compte-rendu de Qui veut bien jouer avec moi? de Lawrence Cohen.   Les épisodes précédents sont ici:

    Épisode 1: réaction et avertissement

    Épisode 2: réservoir - l'enfant qui fait mal - je suis désolé - les exclusions

     

    6.  Laisser l’enfant gagner, un moyen de lui donner confiance en lui

     Voici l’autre grand enseignement du livre de Cohen.  Ce dernier le résume joliment :

     «  Favoriser l’enfant ou le laisser en charge du jeu l’aide à s’enraciner.  L’obliger à se démener de son mieux sans traitement de faveur lui permet de tester ses ailes » (p. 309).

    Pour un enfant, s’enraciner et déployer ses ailes sont nécessaires. 

    Avant Cohen, j’avais bien lu quelque part que certaines personnes préconisaient de laisser leur enfant gagner.  Mais je demeurais sceptique.  Après avoir entendu Filliozat parler de Cohen et après avoir lu le bouquin en question, je suis convaincue de la pertinence de tricher en faveur d’un enfant qui a besoin de remplir son réservoir, qui a besoin de gagner pour se sentir fort-e.

    Il me semble que cette idée est sans doute une des plus difficile à accepter, tellement est ancrée celle qu'il convient d'enseigner à son enfant à perdre, l'idée sous-jacente étant qu'il est pertinent de préparer l'enfant à affronter le monde (pp. 114-115).

    De nombreux parents souscrivent d'une manière ou d'une autre à ce genre de philosophie d'un monde froid et cruel, convaincus de devoir préparer leur enfant aux difficultés de la vie en l'y habituant.  Seulement, si tant de difficultés l'attendent, à quoi bon lui infliger plus encore de déconvenues et d'humiliations que ce qu'il rencontrera de toutes façons?  Ce dont un enfant a besoin, c'est de sécurité intérieure et de confiance en ses capacités; or, il ne les acquerra qu'en étant bien entouré et comblé d'amour.   S'il n'est pas bon de lui épargner la moindre contrariété, il est inutile, à l'inverse, de l'endurcir: la méthode n'a pas fourni ses preuves, à en juger par l'agressivité des jeunes gens auxquels on a seriné qu'il ne fallait rien attendre de bon de ce monde cruel.  Ceux qui ont intégré le message se montrent justement les plus enclins à la violence.  Je me rappelle encore la première fois que j'ai lu, sur un casque militaire, pendant la guerre du Vietnam: ''Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens".  [...] 

    Certains parents pèchent par excès inverse en protégeant leur petit ange à outrance, en lui évitant le moindre revers.  Loin de le préparer à la vie, ils font de lui un adulte craintif et timoré (p.  115)

    En bref:

    Imposer des règles à l'un des ses parents ou l'écraser à plates coutures au basket comble le besoin d'attachement d'un petit; ce qui lui donne le courage de se mesurer par la suite à ses pairs, que la partie soit égale ou non. (p.  116)  

     

    7. Encourager son enfant à exprimer ses émotions

    " La plupart d'entre nous dépensent une énergie mentale considérable à contenir leurs émotions et  inciter leurs enfants à en faire autant." (p. 329)

    Or, taire les émotions ne les empêche pas de naître, et surtout, "elles ont une irrésistible tendance à s'exprimer en dépit de nos tentatives de les brider" (p. 329).  Elles s'exprimeront d'une manière ou d'une autre.  A force de les nier, elles risquent fort bien d'exploser dans un moment inopportun et de manière inappropriée, ou de consumer la personne de l'intérieur...

    Lorsque l'on voit un-e enfant exprimer sa souffrance, on a l'impression qu'elle/il incarne la souffrance.  Son expression nous paraît exagérée.  Elle l'est, pour nous, qui avons appris à contenir notre émotion, à l'exprimer selon les codes de la vie en société.  L'enfant n'a pas encore intégré l'inhibition que nous, adultes, connaissons.  Avec le temps, l'enfant acquiert la parole pour s'exprimer, mais avant celle-ci, les pleurs sont son outil d'expression privilégié pour manifester une contrariété, une colère, une frustration, etc. [1] L'empêcher de pleurer revient à lui interdire, non pas d'être contrarié-e, d'être frustré-e, d'être en colère (car l'émotion naît indépendamment de lui/de nous), mais de reconnaître sa frustration, sa colère, sa contrariété et de l'exprimer. 

    Bref, "Empêcher un enfant de pleurer revient à lui ordonner à se taire.  Bien sûr, s'il pleure parce qu'il a soif ou sommeil, il n'y a aucune raison de ne pas lui donner à boire ou de le coucher.  Ses larmes se tariront d'elles-mêmes, parce qu'il sera satisfait.  L'enfant pleure toutefois souvent pour évacuer les frustrations et les tensions que lui causent la quantité d'expériences nouvelles auxquelles il se livre chaque jour" (pp. 349-350). 

    Pour l'adulte, les pleurs des enfants sont très confrontants car ils sont l'expression d'émotions. Pour peu que l'adulte s'efforce à contenir ses émotions, ou certaines d'entre elles, les voir s'exprimer de manière si spontanée et libre chez un enfant déstabilise et met dans une position très inconfortable.  

    " Il n'est pas surprenant que les jeunes enfants maltraités le soient précisément quand ils pleurent.  Les hommes qui battaient leur femme et leurs enfants [... ] disaient ne pas supporter qu'un enfant ou une enfant n'arrête pas de pleurer: cela les mettait hors d'eux.  [...]  Même dans les foyers qui échappent à la violence, les pleurs des enfants, d'une force terrible, ont le don de stopper net les parents dans leur élan.  Beaucoup sont prêts à tout pour que les larmes cessent: céder, menacer, supplier, punir, envoyer l'enfant promener, consentir à ses demandes déraisonnable, etc. Les émotions que nous acceptons et laissons s'exprimer s'avèrent toutefois moins perturbantes à long terme".  (pp.  330-331).

    Lorsqu'un enfant pleure, beaucoup d'entre nous faisons tout pour que les pleurs cessent.  Or, si les pleurs ne sont pas l'expression d'un besoin physique (manger, froid, être changé-e, etc.), ils peuvent aussi traduire la manifestation d'une émotion (voy. Aletha Solter).   Cela peut être excessivement pénible et difficile pour un-e adulte de laisser son enfant exprimer une émotion par les pleurs ; certain-es sont prêt-es à tout pour faire cesser cette expression.  Certain-es enfants l'ont bien compris.  Il y en a qui réclament une friandise afin de passer un moment difficile.  Le sucre aide à taire ses émotions et s'avère une compensation très pratique dont peuvent abuser enfant et parent incapables d'entendre les émotions (p. 335). 

    " Si le rire est le moteur du jeu, les larmes sont l'huile qui en graisse les rouages.  Un jour qu'elle jouait avec ses cousins, Ruth, quatre ans, se fit mal à la main.  Je la pris dans mes bras tandis qu'elle pleurait à chaudes larmes. Un rapide examen m'assura qu'elle ne nécessitait pas de sons médicaux; rien que de réconfort.  Au bout de quelques minutes, Ruth se calma, me raconta ce qui lui était arrivé et se remit aussitôt à pleurer.  A l'issue d'un petit temps de larmes supplémentaires, elle s'accrochait à moi, alors que ses cousins retournaient jouer.  Ceux-ci l'avaient attentivement observée, impressionnés, selon moi, par la force de ses poumons et le fait que je la laisse pleurer sans tenter de la distraire ou de recourir aux habituelles promesses ou menaces. 

    Au bout d'un moment, Ruth me tourna le dos et fit mine de vouloir s'en aller.  Je la retins gentiment et lui rappelai: "Tu as eu très mal".  Elle pleura quelques minutes encore et me raconta une fois de plus ce qui lui était arrivé.  Elle posa ensuite un regard franc et radieux sur moi, sur ses cousins, de nouveau sur moi et se mit à rire: "Tout d'un coup, c'est redevenu amusant", commenta-t-elle avant de retourner jouer.  Je sais que beaucoup, à ma place, auraient libérer Ruth après la première crise de larmes, en la supposant consolée.  Je la reins un peu plus, le temps qu'elle guérisse de ses émotions, au lieu de la pousser à passer outre.  Quelques sanglots encore lui permirent de surmonter son traumatisme pour de bon."  (p. 332-333)

    "Dès qu'ils éclatent en sanglots, on leur dit de se taire.  Ils n'en finissent donc jamais de lâcher ce qu'ils ont sur le coeur; ce qui explique qu'ils recommencent tout le temps.  Leurs parents ou leurs camarades les trouvent geignards.  Eux ont l'impression de ne jamais pouvoir pleurer tout leur saoûl.  Avez-vous déjà tenté de discuter avec quelqu'un qui vous interrompt sans cesse?  Soit vous renoncez, soit vous multipliez en vain les tentatives de prendre la parole" (p. 353)

    Pour interroger notre ré-action face à des pleurs, Lawrence Cohen propose de nous interroger:

    "Vous laissait-on pleurer seul sur votre oreiller?  Vous l'interdisait-on?  Avez eu la chance qu'un ami, un parent ou une nourrice vous offre une épaule sur laquelle vous appuyer" (p. 351)

    Ces questions me paraissent fondamentales! 

     

    8.  L'enfant qui nous réclame mais qui nous ignore quand nous nous occupons enfin d'elle/de lui

    Il peut être déroutant pour un-e adulte de voir un-e enfant nous ignorer au moment même où il-elle concède enfin de jouer avec lui/elle. Or, c'est sans doute sa façon à elle/lui de rejouer la scène en inversant les rôles.  A lui/elle de vous ignorer, vous l'adulte, comme lorsque vous n'étiez pas disponible et à vous de réclamer son attention.  La tentation est alors grande de laisser l'enfant bouder et de retourner à vos activités.  Lawrence Cohen vous invite au contraire à persister à vouloir établir le contact. (p. 274)

     

    8. L'humilité de l'adulte qui reconnaît s'être trompé-e et le "non qui contient" (le non holding)

    Lawrence Cohen dénonce les parents rigides, d'une sévérité stricte.  Pour lui, une crise de rage permet au parent de réfléchir davantage à la décision qu'il/elle a prise et qui conduit son enfant à une telle crise.  

    "Les crises de rage nous amènent parfois à prendre conscience que nous n'avions pas de raison valable de dire non.  Malgré tout, coincés, nous ne voulons pas céder.   Pourtant, si notre non ne se justifie pas, mieux vaut être prêt à changer d'avis.  Un enfant est capable de distinguer entre céder aux cris et revenir sur sa position à l'issue d'une réflexion.  Ne jamais reconsidérer ses décisions n'est pas une preuve de constance, mais un refus d'envisager d'autres points de vue ou la possibilité de se tromper.  Nous ne voudrions certainement pas que nos enfants prennent modèle sur un tel entêtement" (p. 340)

    Certaines personnes, trop fières, refusent d'accepter de montrer qu'elles se sont trompées.  Elles ne sont pas capables, seules, de revenir sur leur décision, alors qu'elles peuvent convenir que celle-ci est inadéquate.  Dans de telle situation, la discordance éducative est alors primordiale (j'en parle dans mon compte-rendu Il est permis d'obéir, une petite relecture peut être utile).  Et ce, jusqu'à ce que l'intéressée puisse par elle-même réfuter sa décision initiale.  

    Nuançons toutefois. 

    " Donner quelque chose à l'enfant en respectant ses choix n'est pas non plus le gâter.  [...]  donner par crainte de la réaction de l'enfant ou par culpabilité conduira sur la voie d'un laxisme défavorable.  On gâte excessivement un enfant quand on lui cède en sachant qu'il vaudrait mieux ne pas lui donner. Peut-être parce que nous ne supportons pas de le voir triste ou en colère ou frustré ou que nous refusons d'admettre qu'il puisse se sentir aussi mal.  A moins que nous ne voulions plus l'entendre se plaindre.  Quoi qu'il en soit, dans ces cas-là, nous ne donnons pas: nous cédons" (p. 387). 

    En même temps, Lawrence Cohen admet sans peine qu'il est des moments où "il est nécessaire de dire non" et de rester sur le "non", car "un non ferme peut l'aider à se libérer des émotions refoulées qui le retiennent d'apprécier ce qu'il a" (p 280).

    En un sens, dire non revient à contenir l'enfant comme dans le holding, à lui fournir une digue contre laquelle il déversera ses trop-pleins de craintes, de colère et de frustration.  Il se peut que, face à un "non", il pique une crise de fureur, fonde en larmes ou explose de rage.  Il ne se comporte pas forcément en enfant gâté mais il "joue", même si ce n'est pas le genre de plaisir que nous associons généralement au terme de jeu.  Il saisit un prétexte anodin pour exploser parce qu'il ne dispose pas des mots ni de la maturité nécessaire pour exprimer simplement ce qu'il ressent.  La condescendance n'est pas de mise: la plupart des adultes en font autant.  Songez à votre dernière dispute avec votre conjoint ou un ami.  Ne lui auriez-vous pas cherché querelle à propos d'une broutille, faute de parvenir à vous exprimer sincèrement? (p. 280) 

    Ce besoin de holding (d'un non ferme) est approprié lorsque l'enfant, après avoir obtenu ce qu'il réclamait, demande autre chose et ainsi de suite.  C'est également le cas quand il persiste à se mettre en danger ou à s'adonner à une activité destructrice ou nocive.  

    "Tous les enfants ont besoin d'entendre des "non" prononcés d'une voix douce et aimante; pas rageuse" édictés uniquement sous la colère.  (p. 389)

    En résumé

    Les extrêmes se rejoignent et pour stopper les larmes et les rages, parents laxistes ou autoritaires auront des attitudes étonnamment proches.  Des parents implacables puniront durement l'enfant qui pleure ou tempête, parce qu'ils ne supportent pas ses cris.  De l'autre côté du spectre, des parents laxistes lui céderont pour la même raison.  Eux non plus ne supportent pas les crises, sauf qu'au lieu de punir, ils se mettent en quatre pour éviter la moindre contrariété.  Ils ouvrent ainsi la porte au chantage émotionnel en incitant leur progéniture à les manipuler et à se comporter en enfants gâtés (p. 388)

    Dans le prochain volet, je rapporterai ce que pense Lawrence Cohen des jouets, des parents dont le réservoir est vide et de son approche ludique pour un-e enfant souffrant de la séparation d'avec sa maman.

     


     

     

    [1]  "Quand l'enfant voit une instance supérieure entraver sa volonté, il n'a pas forcément d'autres choix que d'exploser.  Que pourrait-il faire d'autre?  Il ne maîtrise pas assez le langage pour défendre sa cause.  Il n'a pratiquement pas accès aux ressources de la famille: il ne peut donc pas menacer de garder pour lui une allocation ou de s'emparer des clés de la voiture [...] La rage d'un tout-petit qui se jette par terre en mêlant des sanglots à fendre l'âme à des cris de colère lui permet d'exprimer avec une formidable éloquence, certes rarement appréciée, ce qu'il ressent au fond de lui".  Alicia Lieberman, La vie émotionnelle des tout-petits, Paris, Odile Jacob, 1997 citée par L. Cohen, pp. 338-339.

     

     


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  • Vraiment, si vous ne la connaissez pas encore, je vous invite de la découvrir: Isabelle Padovani!

    https://www.youtube.com/watch?v=qzNUjoyr7mc

    J'aime son humilité. 


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  • Suite de mon "compte-rendu de Qui veut jouer avec moi? de Lawrence Cohen", voy. le 1er épisode ici.

    Le livre parait structuré.  Toutefois, à bien à y regarder, les idées se croisent et s’entrecroisent.  Cohen parle partout de la même chose en définitive : de l’intérêt et de l’importance de jouer avec les enfants.

    1. J’aime l’image des réservoirs

    Je trouve très parlantes les images sur les réservoirs, vides, pleins, à moitié vide, à moitié plein, remplis à ras-bord, les réservoirs fissurés jamais remplis (p. 82-84).

    « Remplir sans cesse le réservoir de l’enfant est le fondement des relations cœur à cœur parent/enfant.  Il ne s’agit pas de le remplir une fois pour toujours mais d’y revenir au fil d’innombrables micro-interactions sur une durée qui se compte en années. » (p. 85)

    Nombre d’enfants préfèrent les punitions ou les coups à l’indifférence.  Souvent, d’ailleurs, l’adulte comprend que l’enfant cherche à « faire son intéressant », à attirer son attention.  Il est dès lors paradoxal de ne pas accorder à un-e enfant qui en a besoin, l’attention qu’il/elle souhaite.  Peut-être qu’en obtenant enfin de l’attention, l’enfant n’éprouvera plus le besoin de faire des « bêtises » pour nous faire réagir.  

    « Malheureusement, la réaction la plus courante aux débordements de l’enfant indocile – l’ignorer –ne peut qu’accentuer sa détresse et donc ses comportements parasites motivés par l’impératif de faire le plein [de son réservoir] ».  (p. 83).

    J’avais, à l’époque, partagé ma perplexité devant le conseil d’ignorer mon fils prodigué par l’une de ses jardinières d’enfants à qui nous avions partagé notre impuissance et notre épuisement face au colère de Fiston.

    Cohen propose cette interrogation face au refus d’accorder de l’attention à un enfant qui en réclame : viendrait-il à l’esprit de priver d’eau un-e enfant qui a soif ?  de nourriture un-e enfant qui a faim ? (p. 369)

    Cela me rappelle les propos d’une amie concernant un livre.  Celui-ci disait en gros : donne le pouvoir à  la personne qui le veut, la richesse à celle qui le désire, la santé à qui la réclame, etc.  Bref, Seigneur, exauce les vœux des gens.  Je me souviens avoir été outrée par le « donne le pouvoir à la personne qui le réclame »…En voilà, un sujet de dissertation intéressant… 

    2.  Un-e enfant qui agit mal a autant, si pas plus, besoin de notre réconfort

     C’est peut-être THE enseignement qui fut comme une révélation.  Sans doute l’avais-je déjà lu quelque part.  Probablement.  Mais, ce n’est qu’avec ce livre que cette idée, répétée à maints endroits dans le bouquin, a pris sens pour moi. 

    Suite à une altercation entre deux enfants, ce sont deux êtres qui ont besoin de réconfort.  Naturellement, nous sommes enclin-e-s à réconforter celui / celle qui a eu mal, celui / celle qui est « la victime ».  Cet enfant-là, bien sûr, a besoin d’être reconnu dans sa douleur et dans son droit de ne pas être tapé-e ou agressé-e[1].  Ce que nous oublions souvent, c’est que l’autre enfant, également, a besoin de notre écoute et réconfort.  Lawrence Cohen prétend ne connaître personne qu’une punition a rendu meilleur-e.  Beau sujet de dissertation.  Avec des liens à établir avec les prisons qui criminalisent plus qu’autre chose [2].

    Bien que ce fut sans doute une découverte théorique, force m’est de constater que mon enfant incarne parfaitement ce besoin.  Et cela, je l’avais bien déjà observé.  Lorsqu’il réalise qu’il a fait mal à quelqu’un (souvent sa sœur), il ne peut s’empêcher de pleurer, comme effrayé par son geste et sa capacité à faire mal.  J’ai vite compris que mon fils « fonctionnait » ainsi ; il a autant besoin de réconfort quand il a eu mal que quand il fait mal. Évidemment, quand ma fille pleure à chaudes larmes parce qu’elle a eu mal, et que d’un autre côté, mon fils hurle à la mort parce qu’il a fait mal…forcément, vous imaginez bien vers où se penche plus naturellement mon envie de câlins…Il me faut un effort, une étape cognitive, pour aller à l’encontre de ma propension naturelle à réconforter la personne qui a mal plutôt que celle qui fait mal.  J’imagine sans peine que c’est « normal », « naturel », « instinctif ».

     3.  Pourquoi enseigner à dire « pardon » / « je suis désolé­­­­­­­­‑e » de manière automatique ?

    C’est un gros classique. Les parents aiment à inculquer à leur enfant la politesse.  Notamment le fameux « pardon » ou sa variante, « je suis désolé-e ». 

    Pour ma part, je comprends l’agacement de Lawrence Cohen (j'ai pu l'éprouver par le passé; maintenant, je comprends aussi ce qui peut amener des parents à inculquer cette règle) quant à ces « désolé-e », ces « pardons » prononcés à la va-vite[3].  Je n’ai jamais été convaincue de la pertinence d’exiger de mon enfant qu’il/elle « demande » pardon quand il/elle a fait mal.

    D’abord parce que, tout petit-e, il/elle ne comprend pas la notion de « pardon » à demander.  Ensuite, parce que je peux tout à fait concevoir qu’il/elle ne soit pas assez mature pour réellement désirer s’excuser ou demander pardon.  Enfin, parce qu’arrive un âge où l’enfant, tel que le mien, faisait mal sans remord, sans rougir, puis se contentait de demander « pardon ».  Le pardon semblait pouvoir le dédouaner du mal qu’il faisait ou allait commettre délibérément.  A l’image de ces « nombreux enfants [que Cohen a vu] répéter « je ne l’ai pas fait exprès, c’était un accident, je suis désolé » (p. 375).

    Avec Cohen, je me demande ce qui est pire : de faire mal sans s’en rendre compte, puis de demander pardon parce qu’on n’a pas pris le temps de se demander si son geste allait faire mal ;ou de faire mal en sachant qu’on va faire mal, puis de demander pardon pour excuser son geste ? Est-ce réellement moins pire de systématiquement faire mal parce qu’on n’a pas pris le temps de mesurer si son geste allait blesser quelqu’un ?  [4]

    Bien sûr que pour la personne qui a reçu un coup, le fait de savoir que ce coup n’était pas intentionnel peut avoir (ou pas) de l’importance sur le ressenti du coup. 

    Ceci dit, à force de donner des coups sans le faire exprès,  il peut être bon pour l’enfant de s’interroger sur comment éviter des donner des coups.  Demander pardon ne me paraît pas la solution.  Personnellement, je ne vois pas l’intérêt d’exiger de l’enfant qu’il présente des excuses qu’il/elle ne ressent pas.  Je ne vois pas l’authenticité dans cette communication. 

    Certes, d’autres me rétorqueront qu’il s’agit de politesse ; et que politesse ne rime pas toujours avec sincérité.  Ok.  Alors, limitons les relations de politesse aux strictes relations superficielles qui ne méritent pas de réelle mise en contact entre personnes.  Pour ma part, avec mon enfant, je préfère m’entendre et expliquer mon choix auprès de l’adulte qui accompagne l’enfant blessé que de contraindre mon enfant à faire quelque chose auquel je ne crois pas.  Évidemment, c’est plus facile à dire qu’à faire.

    Dans le même ordre d'idée, je suis retombée dernièrement sur le "Il faut partager", billet écrit il y a 4 ans et toujours pertinent.

    4.  Le drame du biscuit brisé

     Il me semble que c’est ainsi que Catherine Dumonteil-Kremer appelle la crise de larme qui surgit pour un fait tout à fait anodin.  Ce petit fait anodin, certes, n’est pas la cause de la crise de larmes, il en est le prétexte.  Ceci induit des malentendus entre les parents et l’enfant. 

    « ‘’ Tu ne t’es pas vraiment fait mal’’ protestent-ils.  Certes, le petit réagit de manière outrée à une écorchure ou un choc anodin : mais c’est là tout l’intérêt !  Il y voit l’occasion d’exprimer des émotions refoulées, alors qu’il se sent proche de ses parents, en sécurité, grâce à un fou rire partagé ».  (p. 152)

    « Dans la même situation, d’autres parents réagissent excessivement et mettent fin au jeu.  ‘’Ça suffit !  Je t’avais bien dit que tu finirais par te faire mal !’’  Mais si l’enfant prend le prétexte d’une blessure sans gravité pour libérer ses émotions, le jeu ne présente toutefois aucun danger ; il n’y a donc pas de raison d’y renoncer.  Souvent, il suffit de marquer une pause, le temps d’écouter ce que l’enfant souhaite communiquer, avant de reprendre le jeu – d’autant plus amusant que l’enfant s’est enfin libéré du fardeau de ces douloureuses émotions » (p. 152)

     « La plupart d’entre nous dépensent une énergie mentale considérable à contenir leurs émotions et à inciter leurs enfants à en faire autant.  Le hic, c’est que les émotions ont une irrésistible tendance à s’exprimer en dépit de nos tentatives de les brider.  Il en résulte inévitablement un bras de fer, une lutte intérieure entre leur expression et leur enfouissement.  A trop les contenir, nous finissons par exploser ; ou alors à souffrir de la tension qui s’accumule en nous – et qui se traduit par du stress, de l’anxiété, de la violence ou de la dépression.  Quand les émotions se manifestent tout à coup au grand jour, on pourrait croire que le problème est qu’elles s’expriment trop, alors qu’en réalité, elles ne s’étaient pas assez exprimées ; raison pour laquelle l’explosion s’est produite. » (p. 329)

     

    5.  Les anniversaires et les exclusions

     « Si vous voulez que votre enfant soit ami avec quelqu’un, vous invitez sa famille au grand complet. »
    (p. 287).  C’est ce que nous faisons à la maison.
      happy

     Par rapport au choix des ami-e-s à inviter lors d’une fête (d’anniversaire, par exemple), Cohen estime qu’il revient aux parents de dresser la liste des invité-e-s.  En effet,

    « nombre de petits ont tendance à se montrer cruels sans le vouloir, en excluant publiquement certains de leurs camarades, sans se soucier des conséquences émotionnelles et des profondes blessures que cela peut occasionner.  La liste des invités à un goûter d’anniversaire n’est pas une occasion de donner le pouvoir à l’enfant : le moment de le guider surtout quand est un jeu l’exclusion d’un enfant d’un autre type ethnique ou d’une autre classe sociale, le bouc émissaire ou l’intouchable » (p. 287)

    Évidemment, ce genre de propos m’ont énormément touchée, moi qui ai énormément souffert d’exlusion sociale durant ma scolarité.  Je n’ai pas l’impression que mon fils (ou ma fille) ait déjà rencontré une situation d’exclusion (en tant que sujet ou en tant que témoin).  Je pense que, même sans le livre de Cohen, du fait de mon histoire personnelle, j’aurais été très attentive à ce genre de phénomène.  Je me connais une tendance à me diriger naturellement vers la personne, surtout l’enfant, la plus à l’écart, la plus en retrait ; celle que les autres ont tendance à ignorer ou rejeter.  

    La suite du compte-rendu dans un autre billet: Épisode 3: laisser l'enfant gagner  - encourager l'expression des émotions - l'humilité de l'adulte qui se trompe - le "non" qui contient



    [1] "N'oublions pas de réconforter tout autant celui qui a reçu des coups que celui qui en a donné.  Ce dernier aussi a besoin d'un peu de notre attention et pas sous la forme d'une punition" (p. 413)

    [2] Voy. http://strasbourgobservers.com/2012/09/10/eppur-e-lultima-ratio-le-murmure-galileen-de-francoise-tulkens/

     
    [3] « Rien ne m’agace plus que les excuses pas sincères pour deux sous des enfants qui veulent juste que papa et maman leur fiche la paix.  Malgré tout, je vois sans cesse des parents tomber dans le panneau de demander ce type d’excuse » (p. 412)
     
    [4] « Qu’est-ce qui est pire ?  Faire quelque chose exprès, s’en vouloir et présenter des excuses ou agir par mégarde et s’en ficher ? » (p. 375)  

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  • Je viens de terminer ces 4 couronnes pour le jardin d'enfants de ma fille.  Elles sont rembourrées avec de la laine du Chant des Cailles/Bercail! 

    10 mars '15 - La lune, le soleil et les étoiles pour les anniversaires à EOS

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