• 19 février '15 - La foi des croyant-e-s, athées ou religieuses

    Propos d'une non croyante indécise et en recherche...

    C’est très humblement que je souhaite partager une réflexion à propos de la « laïcité ».  En ouvrant ce billet, j’ai effectué quelques rapides recherches sur internet, et y ai découvert d’autres personnes, très savantes he , qui partagent mon point de vue.  Les extraits de livres lus sont souvent étayés par des références très sérieuses, par des propos tenus par des grands penseurs-euses (car je dois malheureusement l’admettre, ce sont, évidemment, majoritairement, des hommes qui pensent …no comment), de la/du sociologue, à la/au philosophe en passant par l’intellectuel-le inclassable…  Mes propos viennent polluer la blogosphère d’un avis complémentaire (j’ai en tête ces critiques sur le flux d’ « informations » qui ne sont que des « avis », peu de textes reflètent en réalité une analyse construite…mea culpa donc de participer à cette orgie d’informations-avis). 

    Cette réflexion a été initiée suite aux attentats commis contre C.H.  J’ai, moi aussi, affiché ma solidarité envers les journalistes.  Comme tout slogan, le fameux « Je suis Charlie » revêt la qualité d’être court et percutant, autant de qualités qui sont également ses défauts.  Que voulaient signifier la plupart des gens qui se disaient être Charlie ? 

    Pour ma part, par ce slogan, j’ai souhaité afficher ma solidarité envers la liberté d’expression. Indépendamment de mes (défauts d’) accointances avec C.H., j’ai voulu mettre en avant cette célèbre phrase d'Evelyn Béatrice Hall que l’on attribuerait injustement à Voltaire:  « Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites mais je me battrai jusqu’au bout pour que vous puissiez le dire ». (voy. aussi ici et ici)

    Par conséquent, je me suis désolidarisée du mouvement « Je suis Charlie » lorsque j’ai lu la 1ère édition de ce journal après les attentats.  L'article est titré:

    Est-ce qu'il y aura encore des "oui mais?
    "Les millions de personnes anonymes, toutes les institutions, tous les chefs d’État, de gouvernement, toutes les personnalités politiques, intellectuelles, médiatiques, tous les dignitaires religieux qui, cette semaine, ont proclamé "Je suis Charlie" doivent savoir que ça veut aussi dire "Je suis la laïcité". Nous sommes convaincus que, pour la majorité de nos soutiens, cela va de soi. Nous laissons les autres se démerder avec ça".

     Et...C'est là que cela devient "très intéressant". Qu'est-ce que la laïcité selon C.H.?

    " [...] la situation sociale des, comme on dit ' populations d'origine musulmane' en France est profondément injuste, oui, le racisme et les discriminations doivent être combattus sans relâche. Il existe heureusement plusieurs outils pour tenter de résoudre ces graves problèmes, mais ils sont tous inopérants s'il en manque un: la laïcité. Pas la laïcité positive, pas la laïcité inclusive, pas la laïcité-je-ne-sais-quoi, la laïcité point final. Elle seule permet, parce qu'elle prône l'universalisme des droits, l'exercice de l'égalité, de la liberté, de la fraternité, de la sororité. Elle seule permet la pleine liberté de conscience, la liberté que nient, plus ou moins ouvertement selon leur positionnement marketing, toutes les religions dès lors qu'elles quittent leur terrain de la stricte intimité pour descendre sur le terrain politique. Elle seule permet, ironiquement, aux croyants, et aux autres de vivre en paix".

    Pour moi, non, et trois fois non, cela ne va pas de soi. Pour moi, le "Je suis Charlie" veut surtout dire: "Je suis pour la liberté d'expression. Je me battrai pour que vous puissiez exprimer vos idées, même si je ne les partage pas, même si je les combats."  Les journalistes et ce journal ont le droit d'exister indépendamment du fait que je sois d'accord ou non avec ce qu'ils et elles disent. Ça, c'est une mise au point.

    Comme C.H., j'estime que le religieux n'a pas sa place dans l'arène politique, dans le sens des partis politiques. Pour cette raison, je n'ai jamais voté PSC, et ne voterai jamais CDH vu qu'il s'agit du PSC (parti social chrétien) qui a simplement changé de nom.

    Mais, est-ce que je défends, comme C.H. une "laïcité point final", donc à l'encontre de la laïcité inclusive qu'il torpille? C'est là où je diffère du point de vue de C.H. qui a une opinion bien tranchée et qui estime que c'est la seule valable.

    Mon opinion va dans le sens de la laïcité inclusive. Mais j'admets que d'autres positions soient exprimées et puissent éventuellement l'emporter.

    ***

    Lorsque l’on pense que quelque chose existe, et qu’on n’est pas en mesure de prouver l’existence de cette chose, on est dans la foi, dans le domaine de la croyance. 

    Les personnes qui pensent que Dieu existe croient en un dieu.  Les personnes qui croient que notre esprit ne s’éteint pas après la mort sont dans une foi.  

    Ce raisonnement n’est pas limité à Dieu ou à la vie après la mort.  Prenons le concept d’inconscient.  Scientifiquement parlant, comment le démontrer ?  A l’heure actuelle, force nous est de constater qu’il est impossible de prouver l’existence ou l’inexistence de l’inconscient, du ça, du moi et du surmoi.  La lecture du Livre noir de la psychanalyse (sur ma liste des livres à lire un jour), auquel a participé un de mes ancien-nes professeur-es (il s’en explique ici) donnera matière à réflexion à ce sujet.   

    Pierre Tévanian, auteur du livre La haine de la religion, cite d’autres exemples de foi : le marché, l’intelligence [1], le mérite, le don, le talent…La psychologie a mis en relief l’effet Pygmalion, les effets des stéréotypes sur les personnes victimes/bénéficiaires de ceux-ci (voy. le livre Psychologie des stéréotypes et des préjugés dirigé par Olivier Klein et Sabine Pohl, opus que je lis au bonheur la chance quand l’envie de vient – en passant, je le recommande).  Je m’en voudrais d’omettre dans cette liste exemplative la croissance…bien qu’induite par l’idée de « marché » cité plus haut. 

    Autrement dit, jusqu’à l’établissement d’une preuve, ce qui ne peut être prouvé « scientifiquement » relève de la foi.  Et ce n’est pas parce que personne n’a réussi à prouver l’existence de Dieu que Dieu n’existe pas.  Personne ne connaîtra la réponse qui est, somme toute, personnelle à chacun-e. 

    Jusqu’aux microscopes de Antoine van Leeuwenhoek, l’existence des bactéries n’était que croyance (voy. ici et ici ).  

    Ce n’est pas parce que l’existence d’une chose n’est pas prouvée scientifiquement, qu’elle n’existe pas.  Croire qu’une chose n’existe pas parce qu’elle n’a pas de fondement scientifique, est une chose, à tout le moins compréhensible.  Par contre, refuser catégoriquement l’hypothèse que cette chose puisse exister au nom d’une rationalité scientifique trahit un esprit obtus et prétentieux. Refuser le doute révèle un manque d’humilité certain.  

    En l’état de la science, personne n’a établi l’existence de dieu.  De même, personne n’a établi l’inexistence de dieu.  Par conséquent, croire que dieu existe relève de la foi. Tout comme, croire que dieu n’existe pas relève également de la foi. 

    Aujourd’hui, il est de bon ton (c’est tendance ; à la mode) de contraindre la société entière à se plier à cette foi que dieu n’existe pas, au nom de la sacro-sainte laïcité, au nom de l’athéisme (qui, je le répète, est, à mes yeux, assimilable à une foi) me paraît critiquable.  Croire que sa foi (l’inexistence de dieu) est supérieure en ce sens qu’elle devrait être respectée par toute personne dénote d’un manque de modestie et d’une fierté un brin immodérée.    

    Un peu d'humilité ne peut faire de tort à personne ou pour l'exprimer positivement: un peu d'humilité peut éviter bien des crispations et permettre un dialogue...Évidemment, si on ne cherche pas le dialogue...

    ***

    Je recommande particulièrement la lecture de ces deux extraits de livre

    (1) Christine DELPHY, Un universalisme si particulier.  Féminisme et exception française, (Éditions Syllepse)

    L’extrait qui suit de l’audition de Didier Leschi, chef du bureau central des cultes (du Ministère de l’intérieur français), montre clairement que le caractère public des religions reste, n’en déplaise aux fondamentalistes de l’athéisme, inscrit dans la loi. Et que l’une des missions de l’Etat est d’assurer le respect de ce principe. Car il serait aberrant que par un renversement pervers, après avoir obtenu la liberté de ne pas croire (en Dieu), il faille aujourd’hui conquérir la liberté de croire ! Ce pays est-il voué à tomber d’une intolérance dans l’autre ? L’athéisme va-t-il devenir la nouvelle religion d’Etat, tandis que ceux qui croient en un ou plusieurs Dieux deviendraient les nouveaux « libres-penseurs », persécutés, pourchassés et embastillés ?

     

    (2) Pierre TEVANIAN,  La haine de la religion, paru en 2013 aux Éditions La Découverte. 

    ***




    [1]voy. ce que j'ai écrit en son temps sur le QI et les HP - ici la vidéo de Jacques Grégoire; ici un récapitulatif des billets sur la question; voy. le commentaire n°1 ici; enfin, je l'avoue, il manque l'essentiel: le compte-rendu, pourtant promis, sur le livre de Wilfrid Lignier erf ; cependant, voy. les commentaires de cet article-ci où je m'exprime sur la HPitude.

     

     

     

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