• [2013-02-09] Pourquoi un AAD et non en plateau technique?

    Sur la page fb "naissance respectée", une femme demande à celles qui ont opté pour un accouchement à domicile pourquoi cette voie et non le plateau technique?

    Certes, il y a 36000 raisons concernant l'intimité, la confiance, etc.

    Toutefois, la 1ère raison à mettre en avant relève d'une différence de taille:

    accoucher à la maison, ce n'est pas accoucher à l'hôpital.  Un plateau technique, cela reste l'hôpital.

    J'ai repensé à un mot que j'avais lu dans Intimes naissances. Choisir d'accoucher à la maison, un livre que je recommande vivement, au même titre que celui d'Isabelle Brabant. 

    J'ai retrouvé l'extrait qui m'a profondément marquée.  Les propos sont de Jacqueline LAVILLONNIERE, sage-femme (sous le titre de "Une utopie en marche").

    « Le modèle des maisons de naissance tel que les pouvoirs publics le pensent, relayés par les obstétriciens, c’est en fait l’autonomie sous haute surveillance !  Je crois que la maison de naissance accolée à une maternité, incite inconsciemment les parents à ne pas envisager leur responsabilité de manière aussi claire.  Se déplacer dans un lieu étiqueté ‘’lieu de soins’’ introduit déjà un déplacement de responsabilité.  Comme une sorte de sécurité que les murs engendreraient spontanément.  A chaque fois que j’ai suivi un accouchement en plateau technique, il y avait une différence très perceptible de comportement, une sorte de démission prévisible qui entraînait un plus grand nombre de besoins d’interventions (perfusion d’ocytocique et péridurale en particulier).  Le besoin d’être un peu plus pris en charge que lorsque les parents sont dans leur maison.  Quand ils accouchent chez eux, leur foyer confère une certaine autorité, une certaine autonomie qu’ils perdent, de façon subtile mais évidente, dès qu’ils sortent de chez eux. » (p. 294)

    Il ne s'agit pas de faire l'apologie de l'accouchement à domicile. Ce serait contraire à mon message que d'"imposer" à toutes d'accoucher à la maison. Pour moi, le meilleur endroit pour un accouchement dépend de chaque femme, il s'agit du lieu où elle se sent le plus en sécurité et où elle a confiance que son bien-être sera pris en compte.

    Ceci dit, il me semble essentiel d'INFORMER sur ce choix possible, sur les avantages et les inconvénients d'une telle option.  Et de sortir de ce discours relatif à la prétendue "hyper sécurité" de l'hôpital.  Au vu de l’accompagnement actuel dans les structures hospitalières, je partage l’avis des femmes qui affirment que « le lieu même de l’hôpital devient facteur de risques »[1].

    Autrement dit, il y a une frontière distincte entre accoucher hors de l’hôpital ou à l’hôpital, qui fait que la réponse est relativement évidente à la question de savoir pourquoi la maison plutôt que l’hôpital en plateau technique.

    En revanche, la question me paraît plus « intéressante » de savoir pourquoi la MdN et pas la maison.

    La maison de naissance est pertinente si le couple ne souhaite pas accoucher chez lui, pour des raisons de proximité avec les voisins (peur que le bruit dérange, qu’ils viennent déranger ; ce fut notre crainte), volonté d’un lieu distinct pour l’accouchement que le foyer, etc.  Les raisons peuvent être diverses.  Mais la MdN n’est pas l’hôpital, c’est un entre-deux. 

    Dans l’interview qu’il accorde à Juliette et Cécile COLLONGE pour leur livre, Michel Odent s’interroge :

    « Ah, on peut se demander si ce n’est pas une façon de revenir à ce qu’a été la naissance dans de nombreuses sociétés.  La tendance pour les femmes était plutôt de quitter leur lieu de vie pour accoucher dans un endroit retiré de la communauté. […] 

    A une certaine époque c’était la même chose en France.  Il n’y avait pas que des naissances à la maison : allait aussi chez la sage-femme pour accoucher ».  (p. 378-379)

     On pourrait longtemps s'étendre sur cette question.  Ici, je souhaitais surtout mettre en exergue les propos de Jacqueline LAVILLONNIERE que je trouve particulièrement justes.


    [1] Béatrice JACQUES, « La relation de confiance sage-femme – femme enceinte. Ou la confiance réciproque », Naissances intimes, p. 356.

    « [2013-02-08] Je ne mange pas, je goûte![2013-02-15] Les sentiers de l'Utopie d'Isabelle Fremeaux et John Jordan [éd. 2012] »

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  • Commentaires

    1
    Tite_bulle
    Samedi 9 Février 2013 à 19:00

    Question intéressante à réponses multiples. Je rejoins l'avis que le lieu d'accouchement choisit par la femme devrait être celui où elle se sent le plus en confiance. Mais est-ce vraiment possible ? Sans même parler de la possibilité de plateau technique ou mdn ou de sf libérale (nous sommes priviligiées à Bruxelles d'avoir ce panel de choix) il y a, malheureusement, tout l'impact de la société.

    La femme ne semble plus être la seule à choisir. Le partenaire d'abord influence largement le choix du lieu de naissance et parfois il faut trouver un compromis. La famille, le vécu transgénérationnel des naissances, ... tout cela vient se rajouter à un choix qui se veut celui du "consentement éclairé" mais qui n'est malheureusement pas tjs sans influence.

    Et puis il y a la confiance personnelle de la femme, la confiance en sa capacité de mettre au monde, de gérer la "douleur" (pourquoi ce mot d'ailleurs ? Le français si riche n'a pas de mot pour réellement expliquer les sensations de la naissance) tout cela sème des petites graines qui germent et grandissent parfois bien avant la première grossesse et qui vont influencer tout le reste.

    Je pense que, pour les premiers bébés principalement, la femme se sent observée, elle doit prouver au monde et à elle-même qu'elle "sait mettre au monde". De nombreuses SF refusent d'ailleurs un aad pour un premier bébé ça aussi ça instille des doutes chez les primipares. Une fois ce premier accouchement "réussi" (là aussi le vocabulaire est particulier...) elle prend davantage confiance en ses capacités et le monde médical également lui fait davantage confiance. Un premier bébé est déjà passé, elle n'a plus à prouver qu'elle sait faire.

    Comment changer ça ? Peut-être simplement en revalorisant encore et tjs l'aspect physiologique et naturel de la naissance et en montrant aux femmes qu'elles ont tjs eu les armes qu'elles réclament actuellement... Elles doivent "simplement" s'en convaincre... et c'est, à mon sens, le rôle principal des professionnels de la naissance, les accompagner vers cette reprise du pouvoir.

    2
    Samedi 9 Février 2013 à 21:46

    Tu as mis le doigt et formulé en des termes très clairs ce que je pense depuis toujours mais que je n'arrivais pas à synthétiser.  Cette confiance que la femme doit avoir en elle...Je compte rédiger un article sur la douleur de l'accouchement...

    Et sur le pseudo choix, l'article que ...oh, je ne l'ai pas mis ici, il est sur fb.  Bon, je vais y faire un lien, donc, cet article explique comme le choix est biaisé.  Il est question de péridurale mais les propos sont éclairants sur l'accouchement en général.

    Je mets le lien dans le texte.

     

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    3
    Samedi 9 Février 2013 à 21:46

    Finalement, pas dans mon article mais ici:

    http://hal.archives-ouvertes.fr/docs/00/08/20/60/PDF/99peridurale.pdf

    Cela vaut la lecture.

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