• 4 août 2015 - Mona Chollet, Chez soi: une odyssée de l'espace domestique, Zones, 2015.

    Mona CHOLLET (que je ne connaissais pas) a accordé une interview à Libération.  J'ai eu le plaisir de découvrir le sujet de son dernier livre. Il a l'air passionnant: Chez soi: une odyssée de l'espace domestique, éditions Zones, 250 p., 16 €, paru le 23 avril 2015.

    4 août 2015 - Mona Chollet, Chez soi: une odyssée de l'espace domestique, Zones, 2015.

    A défaut d'avoir encore lu le bouquin, je réagis et commente les propos qu'elle a tenus lors de l'interview que vous pouvez lire ici.


    "Si vous dites que vous avez des vacances et que vous ne partez pas en voyage, personne ne vous comprend. Les gens sont très vite un peu ­ironiques et condescendants."

    Partir en vacances est une telle norme que ne pas partir exige, de manière douce mais ferme tout de même, qu'on explique ce choix à son interlocuteur-trice.  Il est plus facile de dire qu'on est parti, que de répondre "non, on ne part pas".  L'autre ne sait plus quoi répondre et du coup, souhaite savoir pourquoi (pas de budget?  d'autres plans à la maison? pas envie?  etc.); tandis que quand on part, c'est facile, l'autre demande si c'était bien, etc.  Il m'est plus facile de dire que je suis partie qq jours à la mer (même si ce n'est que 3 jours sur 2 mois de vacances) pour parler longuement de ces 3 jours à la mer, plutôt que de dire que non, nous sommes resté-es à la maison.  C'est ancré, cette histoire de vacances loin de chez soi (ce qui, bien sûr, fait du bien aussi, de temps en temps).


    "On associe facilement les gens casaniers à des personnes manquant de curiosité…

    J’ai eu envie de déconstruire cette idée un peu simpliste. Rester beaucoup chez soi n’est pas forcément le signe d’un manque d’intérêt pour le monde : on déploie sa curiosité tout autant, mais de manière ­différente."

    Sortir de chez soi n'est pas signe de curiosité en soi.  Cela peut aussi être témoignage d'une envie de consommer (consommer de beaux paysages, une cuisine différente, etc.).  L'adage dit que ce n'est pas l'homme qui fait un voyage mais le voyage qui fait l'homme.  Disons que prendre sa voiture ou un taxi, s'engouffrer dans un avion puis installer ses affaires dans un hôtel 3*, demi-pension ou all inclusive, faire 2-3 excursions aux alentours, c'est dépaysant mais bon, c'est loin de mon idée de ce qu'est un voyage.  Ce genre de vacances peut être intéressant et ma foi, utile, pour se reposer. 

    Le pire, tout de même, pour moi, reste les touristes qui ne s'assument pas touristes et se targuent de vivre la vie des personnes locales.  Je me demande souvent si un-e étranger-ère serait passionnée de se lever le matin, se dépêcher pour amener les enfants à l'école, aller au travail, faire ses courses au supermarché, chercher les enfants, aller au parc Seny ou à la forêt de Soignes, aller à la piscine du coin, bref, voir une vie de BXL sans voir la Grand Place, Mannekenpis, l'Atomium.  Une personne traverserait la moitié de la surface de la terre pour voir la forêt de Soignes, le champ des Cailles, etc.? (nous, on est un peu bizarre.  On a un jour amener une amie venant du Japon dans la forêt cueillir des champignon; on a amené des Genevois-es voir le champ des Cailles, négligeant totalement le centre Ville; les étrangers-ères ont visité le centre ville de leur côté). ). 

    "Quand un sujet comme le travail ménager est à ce point méprisé, ça met la puce à l’oreille. Pourquoi le méprise-t-on autant alors qu’il est essentiel – et qu’il peut être agréable quand il est fait dans les bonnes conditions, qu’on a du temps pour le faire, et qu’il est équitablement réparti entre les membres du foyer ? Il y a une sorte de sagesse à faire son ménage ­soi-même. En revanche, lorsque celui-ci est un emploi, cela devient un travail pénible, mal vu, méprisé socialement et physiquement usant. Je cite une femme de ménage qui dit de son travail : «Tout ce que je produis, c’est de la paresse.» Pour ma part, je ­préfère imaginer un modèle de société où on travaillerait moins et on prendrait en main son propre ménage." 

    Tout est dit.  Ce mépris pour une activité pourtant essentielle est assez délirant.  Quand on ajoute à cela que le ménage et sa tenue sont une des sources les plus fréquentes de discorde entre 2 personnes qui vivent ensemble lorsque les  balises ne sont pas clairement posées (que ce soit pour un couple ou une co-location ou autre), le silence des études scientifiques envers ce sujet laisse pantois.

     

    Enfin, voici une des parties qui m'a le plus ravie:

    Et puis, il y a l’image, pernicieuse, de la femme au foyer.

    C’est un mélange d’idéalisation et de mépris. Dans Métiers de femme, Virginia Woolf écrit que lorsqu’elle a commencé à être journaliste, il lui a fallu tuer ce qu’on appelait à l’époque «l’ange du foyer», cette vision idéalisée de la fée du logis. Sinon, «c’est elle qui m’aurait tuée», écrit-elle. Elle explique que cela n’a pas été simple: «Il est beaucoup plus difficile de tuer un fantôme qu’une réalité.» Et c’est vrai que c’est un idéal puissant et séduisant, qui se renouvelle depuis le XIXe siècle. On encourage les femmes à fonder des familles, à fonder leur foyer et leur petit paradis domestique, mais derrière cela, il y a ce mépris, dont parlent, par exemple, toutes ces femmes qui sont à la maison et à qui on demande, dans les dîners, ce qu’elles font dans la vie. Lorsqu’elles répondent «je suis au foyer», les regards se détournent aussitôt… Pour sortir de cette assignation, la revendication féministe du salaire ménager, et aujourd’hui celle du revenu garanti, offrent des pistes intéressantes.

    ***

     

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  • Commentaires

    1
    Mardi 4 Août 2015 à 13:27

    merci c'est intéressant ! Je connais Mona Chollet de ces petites fictions sonores sur Arte radio, sur le thème du monde (glauque) du travail. je ne sais pas si ca existe encore. bises.

    2
    Mardi 4 Août 2015 à 14:51

    Merci Anaïs, tiens, je ne connaissais pas. Je vais googler pour découvrir ces petites fictions que tu mentionnes.

    3
    Karo
    Vendredi 14 Août 2015 à 22:20

    Le livre est en accès libre ici (même s'il est plus agréable de lire la version papier) : 

    http://www.editions-zones.fr/spip.php?page=lyberplayer&id_article=197

    4
    Dimanche 16 Août 2015 à 23:27

    Oh, super!  Merci pour le tuyau du libre accès.  Je n'avais même pas vérifié.  Du coup, je pourrai feuilleter le livre et voir si j'accroche avec le style de l'autrice!

    J'ai trouvé à la givebox (j'en parle ici) un livre de Bruno Latour sur les microbes et sur Pasteur.  J'ai toujours été intéressée par les sujets de Latour dont j'avais beaucoup entendu parlés, surtout de son livre sur Pasteur.  Mais, j'avoue, par exemple, que le style est plutôt difficile d'accès. 

    Du coup, même si je m'intéresse beaucoup au sujet du livre de Mona Chollet, le bouquin de Latour dont j'ai commencé la lecture vendredi me rappelle à point nommé de bien vérifier que j'adhère au style de cette autrice. 

    Remarque, le style de Marcela Iacub aussi, est plus que singulier.

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