• 15 mai '13 - Latouche - Bon pour la casse : compte-rendu partiel et partial

    En janvier 2011 fut projeté à l'Espace Delvaux Solutions locales pour un désordre global.  Ce film fut catalyseur pour moi, pour nous.  J'avais entendu parlé de décroissance mais je refusais clairement de m'y intéresser.  Je craignais le marxisme, le communisme, l'anarchie, les radicaux, l'altermondialisme dans sa caricature...  Finalement, après avoir visonné le film, et lorsque Laurent Lievens, que je ne connaissais pas, doctorant en sciences politiques et sociales, a expliqué qu'il était un fervent partisan de la décroissance, nous lui avons demandé ce que ce terme recouvrait.  Sa réponse fut évasive (les explications méritaient un débat en soi mais on pouvait lui écrire) car elle exigeait une vaste réponse... 

    Nous sommes restés sur notre faim.  C'est ainsi que j'ai commencé à chercher.  A chercher à comprendre ce que ce mot emballait.  Et ce que j'ai découvert m'a parlé un peu.  Puis, beaucoup.  Au fil de mes lectures, au fur et à mesure, mon adhésion aux constats et propositions de ce mouvement s'est renforcée.   Aujourd'hui, il ne fait pas l'ombre d'un doute que je suis objectrice de croissance.  

    Dans ce monde de l'objection de croissance, Paul Ariès est une figure incontournable.  Pourtant, il n'y a pas si longtemps, en mai 2011, je ne le connaissais pas.   Je le "rencontrais" pour la 1ère fois lors d'une de ses interventions à Bruxelles, toujours à l'Espace Delvaux.  J'ai eu l'occasion de relater cette "rencontre".  Vu que l'exposé de Paul Ariès ne m'avait laissé aucune trace, je n'attendais pas non plus de grand miracle avec la conférence de Serge Latouche.

    Et effectivement, l'homme était indubitablement fatigué.  De fait, ses propos n'étaient pas révolutionnaires pour moi qui ai vu Prêt à jeter.   

    Ce professeur français était convié par Paul Lannoye, fondateur du Grappe Belgique et Jean-Baptiste Godinot, de Respire, dont j'ai déjà parlé ici (tout à la fin) afin de partager ses réflexions issus de son dernier opus Bon pour la casse.

    Jean-Baptiste Godinot a rappelé que l'obsolescence programmée, à côté de la publicté et du crédit, constitue un des piliers de la société consumériste.  La somme collossale (j'ai noté 10 milliards) consacrée par le lobbying de la pub est telle que son action s'apparente à une véritable colonisation de l'imaginaire, créant un habitus pour le citoyen réduit à une fonction consommatrice.  J'ai surpris la conversation de deux jeunes femmes, à la sortie du colloque, qui avaient relevé que Jean-Baptiste Godinot avait parlé de régime totalitariste en évoquant la pub omniprésente et surtout, impossible à remettre en cause par les autorités.  Moi, personnellement, ce genre de mots glisse sur moi.  Les femmes étaient choquées et invitaient cet orateur à se pencher sur les goulags pour comprendre le totalitarisme.  Ces slogans glissent sur moi, car malgré toutes les critiques que l'on peut faire à la société dans laquelle nous vivons, je peux la critiquer, l'écrire ici, et en parler autour de moi...Essayez dans un Etat totalitariste...En même temps, je comprends l'usage de ce terme pour expliquer l'omniprésence, l'omnipotence, l'omnitout de la pub dans notre environnement et dans notre (in)conscience.

    Dans un premier temps, Serge Latouche retrace l'étymologie du mot "obsolescence".  Il en décrit l'historique et l'évolution. 

    L'obsolescence est d'abord technique.  Une technique nouvelle vient supplanter celle existante, envoyant celle-ci au placard.  Ainsi le train a détrôné les diligences.  Au risque de faire faillite, les entreprises doivent se renouveller car apparaissent sur le marché de nouvelles machines plus performantes.  En conséquence, plus les outils sont compliqués et sophistiqués, plus il faut faire travailler les hommes.

    Ensuite, l'obsolescence est psychologique ou esthétique.  La mode des jupes courtes une année laisse la place aux longues jupes l'année suivante (depuis quelque temps, sévit la mode des sarouels, vous avez remarqué?).  Cette obsolescence a toujours existé mais elle s'est exacerbée avec la classe de loisir.  Olivier De Schutter en parle dans son article dans  Ka!ros (je le cite un peu ici).  Thorstein Velben, fils de paysans norvégiens, dénonce, en 1899 (!), dans sa Théorie de la classe de loisir la consommation ostentatoire.  

    Enfin, vient l'obsolescence programmée, dite aussi plannifiée.  La fin d'un objet est prévue dès sa conception.  Dans les années trente, alors que souffle la mode des plans (New Deal, plans quinquénnaux, etc.), Bernard London propose de mettre fin à la dépression grâce à l'obsolescence programmée (planned obsolescence).  Il invente la prime à la casse (plus d'infos sur wikipedia). Lorsque ce concept débarque en Europe, il est très mal vu.  

    Par contre, Outre-Atlantique, il est accueilli avec enthousiasme.  Ce qui convient à General Motors sied à l'Amérique. 

    Latouche rapporte ensuite le combat notoire entre Ford et General Motors, remporté par ce dernier en dépit du bon sens.  Si le premier construit des voitures robustes, plan sur lequel il est supérieur, GM lance une mode des voitures.  La carrosserie est déclinée afin d'attirer la gente féminine.  Cette stratégie paie. 

    Puis, entre '43 et '47, on ne construit plus de voiture mais des chars d'assaut.  Ceux-ci deviendront, une fois la guerre terminée, des tracteurs. 

    Dans les années '60, naît l'ère du jetable.  Les biens d'équipement doivent être renouvellés.  Cela va des cols jetables, aux manchettes jusqu'aux serviettes hygiéniques, qui sont en réalité, des bandelettes, reliquats de la guerre.  Il y a eu les rasoirs jetables, puis les préservatifs jetables.  Aujourd'hui, ce sont les Iphone jetables. La batterie indésolidarisable du téléphone portable est interdite mais Apple préfère payer des amendes plutôt que de modifier son mode de fabrication, bien plus lucratif.  

    Suivent l'histoire du cartel Phoebus et de l'ampoule de la caserne de pompier que l'on peut voir ici (on en parle dans le documentaire Prêt à jeter).

    Alors, comment lutter?  Quelles sont les pistes de Serge Latouche?

    Certes, dit ce dernier, les industries sont très actives au niveau du lobbying. Mais le pire, ce qui fait le plus peur, ce qui me désespère le plus (à moi, Den), c'est la complicité des consommateurs (soulignée par l'économiste).  Exemple: le téléphone portable.  Même avec l'obsolescence programmée, les gsm sont encore opérationnels 6-7 ans.  Or, les gens en changent en moyenne tous les 18 mois (quand on parle gsm, je pense à mon "vieux" gsm de presque 8 ans, l'âge de mon couple )

    C'est juste hallucinant, cette complicité des "consommateurs" (je déteste réduire les gens à des consommateurs).  Disons, pour compter large, qu'il semblerait que vous et moi changions de téléphone portable tous les 2 ans!  Quelle horreur!  Serge Latouche a parlé de ce que deviennent ces téléphones jetés, ces enfants qui vagabondent dans les décharges à la recherche du minerai rare radioactif...(voy. téléphone portable : le prix du sang africain 1/3; 2/3; 3/3;  un résumé de ce documentaire diffusé sur Arte)

    Dernièrement, deux rapports viennent d'être publiés, l'un du think thank Terra Nova et l'autre des Amis de la Terre. 

    Cinq pistes sont avancées:

    1.  Augmenter de manière contraignante la durée des garanties de 2 ans à 5 ans ;

    2.  Obliger les producteurs à fournir des pièces de rechange de leurs produits pendant 10 ans après la mise sur le marché de celui-ci ;

    3.  Obliger les vendeurs et producteurs à afficher la durée de vie du produit;

    4.  Développer le leasing.  Si les entreprises louent leurs machines et sont chargés de leur entretien, elles auront intérêt à ce que celles-ci soient de qualité et ne tombent pas en panne.

    5.  Autoriser les "actions de groupe", les class actions comme on dit aux Etats-Unis.  C'est là un combat énorme sur le plan du droit: autoriser les actions collectives pour les questions en lien avec l'environnement!

    Ces "solutions" s'apparentent à des pansements sur un chancre.  Car, dans notre société, nous nous heurtons à un système schizophrénique.  Le Ministre de l'Environnement dit: "préservons la planète", de l'autre, le Ministre de l'Economie dit: "il faut relancer la confiance (sic) des gens, il faut qu'ils consomment!"...

    Le seule solution, plaide Serge Latouche que l'on sent fatigué de répéter inlassablement le propos: sortir du logiciel de la croissance pour la croissance. Il convient de construire l'autolimitation et la frugalité volontaire. 

    Suit la traditionnelle étape de questions-réponses. 

    Se déroule un dialogue de sourds, par questions-commentaires interposés, entre une militante claire de la décroissance qui parle de la taxe sur l'exportation des matières premières (dont celles du minerai radioactif nécessaire pour fabriquer des téléphones portables, le coltan) et une jeune femme du public, propre sur elle, et particulièrement loyale envers son employeur qu'elle a à coeur de défendre : la Commission européenne (DG des matières premières)...Cette participante observe qu'on est dans une société capitaliste, que ce faisant, augmenter les taxes engendrerait une flambée des prix et, partant, un manque de concurrence de l'industrie européenne...un dialogue de sourds.

    Latouche ne prend même pas la peine de commenter l'intervention de la dame. 

    Sur la croissance, l'intellectuel précise qu'il n'y a rien de pire que l'absence de croissance dans une société de croissance. 

    Et Serge Latouche d'énoncer 3 mesures qui devraient être mises en oeuvre.  Mais, on sent que ce dernier n'y croit plus :

    1.  Relocaliser les activités.  Appliquer un protectionnisme intelligent (pas le protectionnisme qui consiste à subsidier notre agriculture industrielle pour en inonder les marchés des pays pauvres);

    2.  Oeuvrer à un vaste plan de reconversion écologique de l'agriculture, de l'énergie, des moyens de transport;

    3. Réduire les horaire de travail.

     A quelqu'un qui lui demande que faire quand la catastrophe arrivera, l'orateur répond que la catastrophe est déjà là.  Et l'homme de citer Guillaume d'Orange: "Point n'est besoin d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer". 

    Quant à la création d'un parti politique pour la décroissance, Latouche n'y est pas favorable.  La politique, il nous encourage à y participer mais précise-t-il, elle ne se réduit pas aux partis politiques, ni à vouloir participer à un gouverment.  Il invite les citoyens à se mobiliser pour contraindre le politique à se mouvoir dans le bon sens. 

    Sur ce point, je crois cette tentative vaine...mais bon, c'est mon point de vue.

    Pour conclure, je trouve que la citation "Point n'est besoin d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer" sied le mieux à l'état d'esprit de Latouche.  Et je le partage.  Comme lui, et comme Paul Lannoye qui a insisté sur ce point, j'estime que la catastrophe est déjà là.  Pourtant, cela ne signifie pas qu'il ne faut rien tenter...des sparadraps sur des plaies béantes.

     

    Avertissement: ce "compte-rendu" est, comme tous mes comptes-rendus, partiel et partial.

     

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  • Commentaires

    1
    m'fi
    Jeudi 16 Mai 2013 à 00:10

    J'ai trouvé ton compte rendu (partiel et partial ) très instructif.

    Il me conforte dans l'idée que la décroissance est un concept intéressant. C'est d'ailleurs en découvrant ce concept que j'ai pris des claques et ai été convaincu que changer de mode de vie était indispensable. Je le trouve donc intéressant car il a été pour moi un déclencheur mais je n'y adhère plus totalement car je le trouve culpabilisant, un peu négatif (notamment par son côté négation du concept de croissance), un peu trop politique et pas vraiment adapté aux simples gens. J'en veux pour preuve les mesures de Latouche lui-même: elles concernent plus la sphère politique que l'homme de la rue. Ce ne sont pas vraiment des mesures applicables par les gens dans leur vie quotidienne (et d'ailleurs, il semble lassé de les dire... Preuve qu'elles n'atteignent par leur cible.)

    A mon sens, d'une part, "On ne peut compter que sur soi-même." Cette expression est un peu réductrice mais je crois que le changement viendra d'abord de la base, des simples gens et de leur capacité à imaginer de nouvelles choses, à se réappropier leur vie, à imaginer un autre mode de vie plus en adéquation avec eux-même et leur milieu de vie... Ensuite, seulement, le politique suivra. Les politiques comptent sur les gens pour être réélus. Ils ne prendront que des mesures qu'ils sauront soutenues par la base. Du coup, si l'homme de la rue dit: "je veux consommer", le politique lui donnera du "pouvoir d'achat" (je déteste cette expression ). Si l'homme de la rue dit: "j'ai décidé de moins travailler, de gagner moins, pour m'occuper plus de mes enfants et faire mon potager", le politique lui donnera peut-être un cadre légal pour ça. (Du moins, on peut espérer...  Je caricature mais je pense que c'est un peu ça.)

    D'autre part, dans le même ordre d'idée, on ne peut agir que dans sa "sphère d'influence" c'est-à-dire ce pour quoi on a des moyens d'actions. Les mesures de Latouche ne me semble pas être dans ma "sphère d'influence" alors j'agit sur des petites choses, petit à petit... J'en parle autour de moi en espérant que ça percute mais sans forcer. Mes petites actions sont, pour l'instant, des petites gouttes qui ne mouillent pas bien fort mais peut-être un jour, après avoir été rejoint par d'autres, deviendront-elles une bonne grosse drache nationale ? ... 

    2
    MarcDS
    Jeudi 16 Mai 2013 à 16:20

    @m'fi

    "un peu négatif (notamment par son côté négation du concept de croissance)" : c'est un peu spécieux comme reproche, car le concept de croissance lui-même est le premier à rejeter toute autre possibilité de système économique. Alors que l'objection de croissance ne cherche pas à faire de la décroissance à tout prix (c'est pourquoi je préfère le terme d'objection de croissance), la logique de croissance exclut toute option qui n'entrerait pas dans son cadre. C'est d'ailleurs en ce sens qu'elle et la pub sont totalitaires, n'en déplaise aux deux jeunes femmes évoquées dans ce (très bon) compte-rendu de la conférence.

    A ces deux jeunes femmes, je dirais qu'un totalitarisme n'a nul besoin d'imposer le goulag lorsqu'il s'impose comme une évidence au point de ne plus être contesté. Mais attendez qu'il soit sérieusement remis en question...

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    3
    m'fi
    Jeudi 16 Mai 2013 à 23:26

    @ MarcDS

    Euuuh! Je ne rejette pas en bloc le concept de décroissance. J'ai d'ailleurs dit que je le trouvais juste "un peu" négatif. Il est clair que la croissance est bien plus négative que la décroissance  qui véhicule, bien entendu, des idées intéressantes.

    Maintenant, je ne sais pas si ça sert de s'exiter sur la croissance et de la critiquer. Après tout, elle n'est qu'un indicateur économique (et c'est donc bien normal qu'un économiste comme Latouche en parle  et pour ce que j'ai déjà pu lire ou entendre de lui, il le fait fort bien.)

    Bien sûr, c'est l'Indicateur économique sur lequel se basent les décideurs pour décider... Et alors? Dans ma sphère d'influence (j'y reviens), puis-je influer directement sur le fait que les décideurs se basent quasi exclusivement sure cet indicateur censé mesurer notre bonheur ? Clairement, non.

    Du coup, on s'en fout un peu de la croissance!

    Laissons les croire pour l'instant qu'elle montre qu'on est heureux et reprenons nos vies en mains pour les faire doucement mais sûrement dériver vers un autre mode de fonctionnement que celui de notre société de consommation. Après, si ce mode de vie redonnant une place de choix à l'homme et à son milieu de vie fait des émules, peut-être que nos décideurs, poussés par la masse de leurs électeurs adorés, changeront d'indicateur. Si ça ne marche pas, nom d'une pipe, ça aura quand-même été bien de tenter l'aventure !...

    Mais je veux bien proposer d'autres indicateurs (pour rire paskeu j'aime bien ça ):

    - la croissance du nombre de m²... ou plutot de km² de potage, preuve que les gens se réapproprient le contenu de leurs assiettes...

    - la croissance du temps que les gens ont partagé, avec leur famille ou leurs amis, pour s'amuser, échanger des idées, manger, rire ou la croissance du nombre de jours par semaine où il ne travaille pas pour prendre soin de leurs enfants, s'occuper de leur potager, aider gratuitement leur voisin, se reposer, se ressourcer...

    - la décroissance du nombre d'heure de transport des gens après avoir changer de travail pour travailler plus près de chez soi...

    - la croissance des parts de salaires que les gens ont abandonné en choisissant de travailler à temps partiel pour gagner moins mais, j'espère, vivre mieux...

    - etc.

    Oups! non! Encore un:

    - la croissance du nombre de commentaires positifs laissés sur le blog de Den 

    4
    MarcDS
    Vendredi 17 Mai 2013 à 00:03

    Sans vouloir ergoter, la croissance n'est pas un indicateur économique, au contraire du PIB. Elle est bien plus que cela: tout notre système économique est construit à partir du concept de croissance, ce qui explique que sans croissance notre économie ne peut pas fonctionner. Ceux qui veulent discréditer la sortie de croissance démontrent facilement que sans croissance, tout se casse la figure: l'emploi, la sécurité sociale, etc... Ils oublient juste de dire que d'autres systèmes économiques pourraient très bien fonctionner sans croissance, et vu l'impasse du système actuel ils pourraient même assurer un meilleur avenir à l'ensemble des hommes.

    Ceci dit, je vote pour tes indicateurs de croissance

    5
    François B.
    Vendredi 17 Mai 2013 à 10:05

    Bonjour et merci pour ce compte rendu qui offre par la même occasion un peu d'espace de débat complémentaire!

    Je ne veut pas entrer dans la discussion décroissance vs croissance, je n'ai qu'une remarque:

    Je pense qu'il ne faille pas s'offusquer de quelqu'un qui qualifie la pub de totalitaire. Il ne faut pas se focaliser et buter sur les mots mais chercher leur signification dans la bouche de celui qui les utilise.

    Ouvrons le dictionnaire.
    Totalitaire:  B. − Dans le domaine pol.Qui fonctionne sur le mode du parti unique interdisant toute opposition organisée ou personnelle, accaparant tous les pouvoirs, confisquant toutes les activités de la société et soumettant toutes les activités individuelles à l'autorité de l'État.

    Pour plusieurs de ces éléments, la pub est totalitaire. L'empêcher et s'y opposer est impossible, elle est partout dans l'espace publique, souvent de manière illégale au vu des règles d'urbanisme, les élus s'en lavent les mains. Tous les pans de pouvoirs dépendent des revenus de la pub (communes, média publics,...).

    Ces pouvois sont également accaparés par la pub car leur décision ne peut pas aller à l'encontre d'un annonceur qu'ils pourraient perdre. Observez la baisse de qualité des émissions de télé publique, elle n'est dûe qu'à la recherche de capter la masse afin d'augmenter les revenus de la pub. Pensez au directeur de TF1 qui disait "mon boulot est de vendre du temps de cerveau disponilbe pour biiiip (une marque de boisson)".

    Deuxième point, pensez à tout ce qui a besoin de sponsor pour exister (spectacle, festivals, rouler à vélo parfois...). Toutes ces activités sont, de facto, confisquées par la publicité.

    Personnelement, je trouve donc que le mot "totalitaire" n'est pas trop fort.

    A bientôt,
    François

    6
    Vendredi 17 Mai 2013 à 17:06

    Hello,

    Merci à vous de débattre sur le sujet.

    Je vais y mettre mon petit grain de sel.

    Heu, non, moi, je ne m'en fous pas de la croissance, vu qu'elle sert de projet de vie/société ici et maintenant, et que, telle une religion, personne dans les médias classiques n'osent remettre en question, encore moins parmi la classe politique (voy. la couverture ridicule de Trends/tendance consacrée aux décroissants: tous en slip! - pas encore lu le texte de 4 pages).

    Pour le côté négation de la croissance, mon homme trouve aussi curieux de plaider un concept en opposition à un autre (la croissance).

    Moi, personnellement, ce mot-obus pour frapper les gens et les amener à réfléchir et à remettre en cause la croissance pour la croissance.  A l'inverse, il est idiot de plaider la décroissance pour la décroissance.  Donc, moi, ce mot, il me convient.  Aussi parce que je vois ce qu'il revête. 

    Pour le côté négatif et culpabilisant, personnellement, je n'ai pas de souci avec cela. 

    A l'heure actuelle, il est politiquement correct de ne pas culpabiliser.  Informer, mais surtout ne pas culpabiliser!  On dit aussi, "responsable mais pas coupable", personne ne veut se sentir coupable.

    Je comprends parce que la culpabilité peut décourager.  Tellement décourager.  Mais, le libre choix implique aussi de se tromper, de faire mal à l'autre.  Quand on sait qu'en agissant d'une certaine manière, on fait mal à quelqu'un, on se sent mal, on se sent, en principe, coupable.  Et c'est une attitude saine, que de se sentir coupable quand on agit en sachant que son action crée du mal quelque part.  La psychologie sociale s'est intéressée au phénomène de culpabilité.  Et relève que c'est un sentiment qui permet la sociabilité.

    Alors, moi, quand je pose un acte dont je connais les conséquences (même vaguement), ben, oui, je me sens coupable.  Je mange de la viande, et encore souvent des aliments greenwashing ou carrément des crasses pleines de pesticides.  Je sais que l'agriculteur qui s'est occupé de cet aliment risque X fois plus de souffrir d'un cancer, qu'il ne reçoit souvent pas un salaire décent, les intermédiaires prenant la plus grande part dans leur poche.  Quand il m'arrive d'acheter un vêtement neuf, je sais qu'il y a 9 chances sur 10 que ce vêtement a été fabriqué par les nouveaux esclaves...

    Je pense que c'est la peur de culpabiliser les gens, ou l'envie de ne pas culpabiliser, qui fait que ma belle-mère, et la personne lambda continue à consommer et acheter comme avant.  Après tout, il faut bien vivre.  On ne va pas se compliquer la vie.  Parce que c'est vrai, c'est tellement plus pratique d'aller en voiture dans un supermarché que de faire la file dans le froid à trois échoppes du marché...

    Bref, la question de la culpabilité, j'y pense souvent et je compte bien y consacrer un article.

    Pour les simples gens...oui, c'est sûr. Pour l'instant, parmi les objecteurs de croissance, je n'ai souvent rencontré que des bobos.  Les bobos détestent qu'on les appelle ainsi.  Mais voilà.  Pour moi, ce vocable recouvre bien les personnes qu'il m'arrive de rencontrer, et dont je suis. 

    Avant de m'intéresser réellement aux objecteurs de croissance, j'avais vu l'un ou l'autre reportage.  Tous des gens, vivant dans une belle maison, qui avaient bien gagné leur vie, puis, qui avaient décidé de changer de cap, à la recherche de plus de sens.  Evidemment, c'est plus facile de décider de gagner moins quand on a déjà payé sa belle maison avec jardin, qu'on a déjà pris l'avion 20 fois dans sa vie, etc.  Allez-y, parlez décroissance à une mère célibataire qui gagne 1100 euros pour un temps plein, paye 600 euros de crèche (parce que pas de place dans une crèche subventionnée)...

    Donc, oui, la question des "gens simples" est une question pertinente, même si je ne sais pas tellement ce que tu entends par gens simples.  En tout cas, je ne te qualifierais certainement comme tel...

    Par ailleurs, pour parler des petits gestes...encore dans l'article d'Olivier De Schutter dans Ka!ros dont j'ai parlé, l'homme dénonce cette politique des gestes individuels.  Il dit, en gros, qu'il convient de changer le système.  Or, ce changer soi, c'est facile (là-dessus, je diverge de son opinion), du moins, on peut espérer le faire seul.  Par contre, changer le cadre, c'est impossible de le faire tout seul.  Et je le rejoins.

    Tim Jackson et d'autres ont vu l'hypocrisie que cette politique cache. J'avais rédigé un article en 2011 à ce propos.  M'fi, tu ne vas pas aimer, il y a beaucoup de citations, en fait que des citations :-).  C'est parce que, ce faisant, j'espère que la lectrice ou le lecteur ici lira ce qui m'a tellement marqué dans les textes que je cite...Mais, si tu veux t'épargner la lecture des extraits, il y a ma conclusion, pas très longue, qui en substance, décrie l'hypocrisie de la perspective de compter sur les gestes individuel.  [2011-07-08] Eloge à la simplicité volontaire et critique de la politique des "petits gestes"

    Pour terminer, s'agissant du totalitarisme, j'avais bien compris...

    Enfin, hihi, ok pour les nouveaux indicateurs...surtout le dernier...Que ce blog puisse servir d'espace de débat, j'adore!

    7
    m'fi
    Vendredi 17 Mai 2013 à 23:43

    [Ce soir un "petit" commentaire car les deux précédents ont été rédigés tard et je suis vanné  Pas le courage de développer plus même si ça me passionne et que j'ai bien plus à en dire! ]

    @ Den

    Précisions sur 3 points:

    1°) la culpabilité. Je n'ai pas envie de faire évoluer ma vie sur base de ce sentiment. Bien sûr, j'en ressentirai encore quand j'aurai gaffé et fait du tord à quelqu'un mais, par rapport à notre société de consommation, je ne veux pas en ressentir car j'ai le projet de ne plus y prendre part. C'est un projet. A l'heure actuel, mes avancées sont fort partielles et imparfaites car moi aussi j'ai mes limites mais le train est en marche et j'espère qu'il ira loin...

    2°) les gens simples. Je n'ai pas écrit "gens simples" mais "simples gens". Je trouve que la position de l'adjectif change la signification. Dans le premier cas, ça fait un peu "idiot du village". Je voulais en fait parler des hommes et des femmes qui ne sont pas sur le devant de la scène et qui agissent chez eux au quotidien. Je me classe là-dedans, comme j'assume tout à fait aussi la catégorie bobo. Et je te rejoins sur le côté élitiste de la démarche... Quand on a rien, c'est difficile d'avoir encore moins.

    3°) les petits gestes. Comme tu aimes les citations, je cite quelqu'un de trrrrrèèès bien... toi : "Par contre, changer le cadre, c'est impossible de le faire tout seul." C'est vrai. Mais ce que je crois, c'est que la somme de petites choses en font des grandes. C'est ce que j'essayais de décrire plus haut: j'agis - j'explique mes actions autour de moi - mes actions succitent l'intérêt autour de moi et sont immitées par Pierre, Paul et Jacques - m'fi, Pierre, Paul et Jacques agissent - les actions de m'fi, Pierre, Paul et Jacques succitent l'intérêt autour d'eux et sont immitées par ... etc. Bref, du coup, on ne sera plus tout seul pour dire à nos décideurs: "Dites les gars! Votre croissance et votre PIB, on les enverrai pas se faire f... ?" 

    Sinon, j'aime ce tac au tac des idées... On les fait mutuellement évoluer... Cool! 

    8
    Dimanche 19 Mai 2013 à 00:18

    Héhé, moi aussi, j'aime cet échange qui m'oblige à afiner ma réflexion!

    1)Pour la culpabilité, oui, je sais, ce n'est pas gai.  On tente de s'affranchir du péché originel si prégnant dans la culture judéo-chrétienne.  Mais...on s'y affranchit tant que plus personne ne veut assumer sa culpabilité...bref.

    2) pour les simples gens, ok pour ta précision, si tu veux dire des gens qui ne sont pas médiatisés.

    3) pour la politique des petits gestes...hihihi   En fait, tu ne me cites pas, mais tu cites Olivier De Schutter, c'est lui qui écrit qu'on ne peut pas changer le cadre tout seul.  Comme quoi, si je vole du texte à d'autres, sans le mettre en exergue, tu le lis

    Bref, mais comme tu n'as pas tout lu, ce que tu précises dans ton dernier comm' est exactement ce que je dénonce et critique, au même titre que la floppée de personnalités que je mentionne dans l'article de 2011: la politique des petits gestes. 

    Mais quelle alternative? Militer dans un groupe de pression.  Je ne vois que cela.

     

    9
    MarcDS
    Dimanche 19 Mai 2013 à 01:46

    "Militer dans un groupe de pression." Effectivement, je crois que le seul espoir d'arriver à faire changer les choses réside dans l'action commune. Et si je suis d'accord avec Latouche pour dire que la politique ne se réduit pas aux partis politiques, ni à vouloir participer à un gouverment, je pense quand même que toute solution pacifique devra passer par le canal politique. Il faudra bien qu'enfin tous les gens qui remettent en cause la logique de croissance arrivent à se faire entendre au niveau politique!

    Evidemment, comme il s'agit de sortir du productivisme, ça va bien au-delà du clivage gauche-droite, et il ne pourrait être question pour un mouvement qui représenterait les idées anti-productiviste au niveau politique de s'allier avec un parti qui ne soutiendrait pas la sortie de la logique de croissance.

    La participation à un gouvernement ne serait donc pas pour demain. Mais ce qui importe avant tout, c'est de se faire entendre, afin de faire comprendre aux gens que les vérités qu'on leur bassine à longueur d'émissions et d'articles de journaux ne représentent rien d'autre qu'une certaine conception - étriquée, égoïste et suicidaire - de la société et du vivre ensemble.

    10
    Dimanche 19 Mai 2013 à 23:36

    @ MarcDS.  On est sur la même longueur d'ondes.  D'où l'intérêt du mouvement POLITIQUE des objecteurs de croissance.

    Et oui, le clivage gauche-droite est obsolète, et vu ce que proposent les partis traditionnels, le mouvement ne risque pas de se retrouver dans un gouvernement. 

    Ce qui m'inquiète surtout c'est la boycott ou la moquerie des médias traditionnels par rapport à la décroissance ou l'objection de croissance. 

    Certains décroissants ont beau critiquer Tim Jackson, moi, j'apprécie son livre.  Il a le mérite d'avoir attiré l'attention des médias classiques sur la remise en cause possible de la croissance comme synonyme de prospérité.

    Dans "Redéfinir la prospérité", Laurent de Briey est un prof d'unif mais également expert politique pour le cdh. J'avais beaucoup aimé sa contribution dans le livre.  Espérons qu'il est écouté au parti orange.

    Tim Jackson, avec Etopia, fait une entrée chez les Ecolo.  J'ose espérer que certaines idées parviennent à percoler parmi la classe politique...

    Mais c'est désespérant lent...Et encore, peut-être suis-je optimiste en espérant que ces idées percolent au niveau politique.

    Le mouvement slow ne signifie pas qu'il faille être lent mais qu'il convient de trouver le rythme pertinent, le bon rythme...

    Comment faire pour percer dans les médias classiques?  J'en connais qui y sont...et ils ne remettent pas en question la religion de la croissance.  Cela en est désespérant.

     

    11
    MarcDS
    Lundi 20 Mai 2013 à 01:22

    @Den

    D'où l'intérêt qu'il y aurait à présenter une liste "décroissante" aux élections, non pas dans l'intention de participer au pouvoir, mais pour profiter de la tribune électorale pour faire entendre un autre son de cloche...

    12
    Lundi 20 Mai 2013 à 12:05

    MarcDS, crois-tu que l'on arrivera à faire parler d'un tel projet politique dans la presse classique?  Quand je vois comment elle peut boycotter, voire ridiculiser, j'ai des doutes...ne faudrait-il pas "infiltrer" les partis traditionnels pour y apporter un changement de l'intérieur (oui, je sais, je plane complètement)?

    13
    MarcDS
    Mardi 21 Mai 2013 à 01:10

    L'avantage de la période préélectorale, c'est qu'il y a une ouverture possible dans les medias pour toutes les listes qui se présentent aux élections. Le tout est de parvenir à en profiter.

    En tout cas, je crois plus à cela qu'à l'infiltration des partis traditionnels qui sont pieds et poings liés par leur obligation de faire un bon score électoral pour pouvoir participer au pouvoir. L'exemple d'Ecolo est édifiant, avec des élus qui ne relaient pas les opinions beaucoup plus remuantes de sa base.

    De plus, infiltrer les partis traditionnels implique qu'on entre dans le jeu et la logique des partis, alors qu'aujourd'hui il s'agit de dépasser ces clivages pour s'attaquer à des enjeux beaucoup plus fondamentaux. Au-delà de l'opposition gauche-droite, il faut parvenir à rassembler les citoyens autour d'un nouveau projet de société qui n'a plus besoin de la croissance pour fonctionner et assurer une vie décente à tous.

    14
    Mercredi 22 Mai 2013 à 21:10

    MarcDS, J'ai quand même des doutes quant à la possibilité d'acquérir une visibilité et surtout de ne pas être raillé par les autres partis.  Quand je pense à Provelo, par exemple, il a été complètement ignoré pendant la campagne. J'ai lu bien plus tard que ce parti avait émis l'idée de décroissance (pas vérifié mais je me rappelle très nettement l'avoir lu).

    Lorsque je vois la mauvaise foi des média (exemple du trends/tendance de ce mois, que j'ai acheté vu que "le" dossier portait sur la décroissance, je n'y crois pas tellement...

    Et c'est fatiguant, à vrai dire, de ne pas y croire, c'est épuisant.  Donc, parfois, je mets mon scepticisme de côté, et je fais comme si...
    Les membres du Mpoc sont-ils majoritairement pour la création d'un parti?  Combien cela représenterait de personnes dans toute la population?

    15
    m'fi
    Mercredi 22 Mai 2013 à 23:52

    "Créer le monde que nous voulons est un mode d'action bien plus subtil, mais plus puissant que détruire celui dont nous ne voulons plus." Marianne Williamson.

    C'est une citation que j'ai trouvée sur le 4ème de couverture du "Manuel de Transition" de Rob Hopkins (que je n'ai pas encore lu mais qu'il faudra que je lise...) C'est chouette, hein, Den ? Je fais une vrai citation ! 

    Cette citation tombe un peu à plat par rapport à vos échanges ci-dessus mais j'ai voulu vous la communiquer car elle dit de façon hyper concise ce que j'ai voulu longuement vous dire et elle colle quand-même bien avec une partie des commentaires ci-dessus.

    Pour rebondir sur le militantisme cités dans les derniers comentaires, je ne peux m'y résoudre. La racine du mot est belliqueuse et ne convient pas au pacifiste convaincu que je suis . Au delà de cette anecdote étymologique, j'ai l'impression (mais je me trompe sûrement) que les gens qui militent le font plutôt contre quelque chose plutôt que pour quelque chose. Du coup, le message ne passe pas forcément bien car ils sont vu comme des enquiquineurs plutôt que comme des gens qui apportent des idées intéressantes (alors qu'ils en ont forcément)... En tout cas, je n'ai pas l'impression que les politiques leur donnent du crédit... Ils les craignent plutôt et les voient plutôt comme des sources de problèmes...

    Et je rejoins Marcs DS sur le score électoral que les politiques veulent atteindre. De nos jours, être politicien est un métier. S'ils ne sont pas réélus, il perdent leur job... Avant, les hommes politiques faisait de la politique à côté de leur boulot. L'effet pervers, c'est que les politiciens se rallient à l'avis le plus répandu parmi les citoyens pour être réélu...

    Et quoi alors?

    Et bien je reviens sur le tapis avec "mes petits gestes" que j'apprends à mon voisin qu'il apprend aux siens, etc. Si des idées nouvelles, porteuses d'un changement de société, sont partagées par un plus grand nombre, le politique les suivra pour garder son job.

    Mon raisonnement est à la limite du simplisme mais je suis convaincu que notre "salut" viendra avant tout de nous-même avant de venir du monde politique. Ce dernier est nécessaire mais ne sera là que comme conclusion et élément structurant (j'ai pas trouvé de termes plus clairs collant à mon idée) de démarches entreprises en amont par les citoyens désireux de changer leur mode de vie.

    Je pense que si la société actuelle ne nous convient plus, c'est à nous, citoyen, hommes et femmes de la rue, de nous montrer imaginatifs pour d'abord réinventer nos propres vies qui déteindront sur d'autres et participerons à émulation menant au changement de société voulu. Sans trop de vagues ni remous.

    Un petit exemple? Les SEL. Ils vivent leurs vies de façon indépendante. Ils participent aux changements mais ne prennent pas part à la structure actuelle de la société. Le monde politique ne semble pas s'y intéresser et pourtant, les SEL se développent de plus en plus. Ca leur pose des problèmes de "gestion" particulièrement quand ils se développent fort (comme le mien) car toute la structure est à inventer mais les SEL continue à intéresser les simples citoyens dédireux de changer une partie de leur vie...

    Les SEL ne sont qu'un élément du changement car toute cette émulation menant au changement de société voulu se fera dans un joyeux désordre. Il y aura un mélange d'idées, de méthodes, de savoir faire... Il y aura des essais, des erreurs, des marches arrière... Ca semblera d'abord complexe et touffu mais ça tendra vers plus de clareté et d'ordre. Un peu comme quand un architecte conçoit un projet (j'en connais un rayon sur le sujet ) qu'il espèrera bon: il a une idée, puis une autre vient s'ajouter en modifiant un peu la première, puis une troisième demande de remanier une partie qu'on croyait importante du projet... Mais quand on regarde bien, ce qu'il ressort de ces idées à plus de finesse et de qualité qu'auparavant et est bien plus que la somme de toute les parties car le lien que les parties font entre elles apporte aussi quelque chose...

    Bref, je reviens sur la citation du début: "...un mode d'action bien plus subtil, mais plus puissant ..."

    PS: ... et en tout cas, Den, ton blog a le mérite de me faire réfléchir et "affiner ma réflexion" comme tu dis si bien (youkouuu! encore une citation! ) J'ai passé mon week-end à tourner tout cela dans ma tête et à me demander: "Mais au fond, qu'est-ce que j'en pense vraiment?" J'ai mis du temps à commenter de nouveau car j'hésitais encore sur mes idées. C'est la lecture de la citation ci-dessus qui m'a décidé. Donc, définitivement vraiment chouette et positifs ces échanges!

     

    16
    MarcDS
    Jeudi 23 Mai 2013 à 00:20

    Je comprends bien ton scepticisme, Den. Je l'éprouve moi-même. Mais je préfère jeter mes forces dans une bataille qui semble perdue d'avance que de rester spectateur du désastre. Au moins dans le premier cas, il existe une chance de l'éviter (ou du moins d'amortir le choc), et sur le plan personnel, j'aurai fait ce que j'ai pu.

    Il n'y a rien de plus désespérant que d'entendre quelqu'un dire "Tu as raison, je crois quon court à la catastrophe mais qu'est-ce qu'on peut y faire?" Si tous les gens qui disent ça se mettaient en résistance, les choses bougeraient!

    "Point n'est besoin d'espérer pour entreprendre..."

    Il importe peu de savoir s'il y a une majorité de membres du mpoc en faveur de la création d'un parti. Ce qui compte, c'est de tenter le coup, en se disant bien que les élections de 2014 ne sont rien d'autre qu'une première étape. A voir l'avancement des idées d'objection de croissance dans la population, je suis sûr d'une chose, c'est qu'elles finiront par s'imposer. Il s'agit juste de les faire avancer plus vite car il ne reste plus beaucoup de temps ...

    17
    Jeudi 23 Mai 2013 à 11:05

    @ M'fi,  Ouf, suis pas la seule à me faire dévorer le cerveau par ces questions en ce moment 

    Ce dont tu parles, c'est LE MINIMUM que puisse faire tout-e citoyen-ne, personne.  Je ne remets pas du tout cela en cause, M'fi.  Du tout.  Tout le monde devrait s'investir dans ces alternatives, qu'elles s'appellent SEL ou champ des Cailles.  Je ne critique pas du tout ces initiatives.  Solutions locales pour un désordre global montre l'importance des gestes quotidiens des femmes et des hommes.

    Toutefois, - parce que tu comprends déjà qu'il y aura un "mais"-, là où je ne te rejoins pas, c'est de cesser l'élan sur ces gestes quotidiens.  Car le plafond de verre installé par le cadre de la société est tel qu'à un moment, tu vas atteindre une limite pour être encore socialement inclus dans l'environnement que tu habites et fréquente. 

    Changer de l'intérieur est magnifiique, et c'est la moindre des choses que de s'y coller lorsque l'on veut modifier la société vers plus de convivialité.  Cependant, il est difficile de demander à une majorité de gens de changer les choses si le cadre ne leur permet pas cela.

    Exemple:

    Lors de la conférence de Latouche, un homme expliquait ne jamais acheter de produit provenant d'une marque qui faisait de la pub.  Alors, tout le monde a réagi et, je pense qu'il y a eu unanimité pour penser (et d'ailleurs, Lannoye l'a exprimé tout haut) qu'il ne devait pas acheter grand chose.  Paul Lannoye a précisé que, certes, pour la nourriture, c'était encore envisageable (achat chez un producteur ou dans son jardin) mais pour le reste, Paul Lannoye a exprimé le scepticisme de la salle.

    Autre exemple:

    Comment acheter sans plastique quand tout est emballé de plastique!  Chaque fois que je jette de l'emballage ou du plastique, je me demande comment j'aurais pu acquérir le produit sans ce plastique.  La seule solution aurait été de ne pas acheter. Parce que des magasins qui vendent en vrac, je n'en connais pas beaucoup!

    [soupirs]  Je pense souvent à Zéro waste.  Et je me demande quand même comment elle fait, cette famille (juste sur la question des déchets, je ne parle pas du transport en voiture et du manque de convivialité, à mes yeux, de cette maison blanche et inerte qui me rappelle les photos des magazines de déco).

    @ MarcDS  Oui, c'est aussi ce que je me dis...je suis sceptique mais je ne peux pas juste rester là et ne pas tenter qqch pour éviter, ou comme tu le dis si bien, amortir le choc.  Alors, un parti politique...évidemment, la question n'est pas nouvelle.  Je l'avais évacuée. 

    Tu trouves que l'idée d'objection de croissance s'immisce dans la population?  Moi, je ne vois pas ça...Je suis pas dans le bon côté de la population alors .  Tu le vois à quoi?  Peut-être qu'un premier indice est qu'on en parle effectivement plus dans la presse traditionnelle. 

    "Point n'est besoin d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer". 

    Tu vas te lancer pour la création d'un parti?

     

    18
    MarcDS
    Dimanche 26 Mai 2013 à 11:39

    @Den

    Juste un indice: il y a 10 ans, une conférence de Serge latouche n'aurait jamais réuni autant de monde. Alors oui, je crois que de plus en plus de monde remet en question notre société consumériste et est déjà en train de changer de mode de vie, à l'image de M'fi. Le problème est de parvenir à faire prendre conscience que 1) toutes ces actions individuelles sont indispensables mais ne sont pas suffisantes, et que 2) les choix de société ne sont pas une fatalité qui nous est d'office imposée d'en haut et qu'il est impossible de changer. Et pour cela il faut parvenir à passer au-dessus des tirs de barrage des mass-medias et de leurs sponsors. Ce n'est pas une mince affaire, mais l'audience de Mélenchon en France, de Grillo en Italie, du parti Syriza en Grèce montrent qu'il y a une écoute de plus en plus grande pour des idées alternatives.

    Quant à la création d'un parti: non, pas un parti, pour les motifs que j'ai déjà évoqués (il faut sortir de cette logique d'opposition partisane), mais... plus d'infos très bientôt ;-)

    19
    Dimanche 26 Mai 2013 à 13:42

    Oh, j'attends les infos complémentaires.

    Pas un parti, alors cela ressemble au mouvement POLITIQUE des o.c. non?

    Bon, ok, j'attends.

    Pour l'audience, moi, c'est le nombre de personnes présentes à la conférence de Pierre Rabhi qui m'avait étonnée, dont la présence d'un couple d'amis aux antipodes des idées de décroissance.  La salle comble à la conférence de Aries m'avait aussi interpellée. 

    Mais entre venir à une conférence et passer des gestes individuels à envisager de dépasser la philosophie personnelle, c'est quand même une marge énorme.

    Bon dimanche!

    20
    MarcDS
    Vendredi 31 Mai 2013 à 00:38

    Il est né le divin enfant

    C'est ici: www.rassemblement-r.be

    Ca a fait l'objet d'une minute au JT de 13h de jeudi.

    Den, j'aimerais savoir ce que tu en penses...

    22
    Vendredi 31 Mai 2013 à 12:05

    Wouah.
    A mesure de lire, je me disais, mais...mais...c'est que ce se tuent de répéter le monde associatif, les Rabhi, les Coline Serreau, les M-D Robin, les Olivier De Schutter...Trop beau   Le tout, rassemblé dans des "lignes de force" qui rappellent vraiment celles d'un parti politique.


    Alors, ensuite, une gêne...Heu, et, le Mouvement politique des objecteurs de croissance?  Il y a dissidence au sein du Mpoc.  Puis, quand j'ai vu que c'était les mêmes noms (Godient, Lanoye...).  Alors, encore un mouvement?  Alors que le Mpoc peine à trouver de la visibilité?  J'avoue du coup, ne pas comprendre l'articulation / la différence / la complémentarité entre le Mpoc et Rassemblement R.  Si tu pouvais m'éclairer?

    Même si je vois que les "lignes de force" sont plus précises que le manifeste du Mpoc.  Et surtout que le Rassemblement R propose des solutions/alternatives concrètes et claires.

    Alors, ok, ce n'est pas un parti car il s'agit de sortir de la logique parti*ane* et clientélisme des partis.  Il s'agit d'innover?  Ok.  Mais  alors, innovez/innovons fort et avec audience!

    Je suis jalouse de ne pas avoir participé à ce truc. 

     

    23
    Vendredi 31 Mai 2013 à 12:33

    Syons honnêtes: j'ai jubilé à la lecture du programme

    Mais...


    Parce que je ne peux m'empêcher d'y mettre mon grain de sel...

    Alors, moi, j'ai été déçue de ne pas y trouver clairement noir sur blanc:

    1. un encouragement pour le modèle des coopératives, à côté des PME.

    2. la proposition pour un revenu de base ou l'allocation universelle.  Le travail de 4 jours, par contre, .  En fait, le programme étant très osé, pourquoi ne pas avoir proposé le revenu de base?

    Lorsque l'on parle d'activités, il y a des activités, qui à l'heure actuelle, ne sont pas viables/rentables.  C'est clairement le cas des crèches et des accueillantes.  Quid des milieux d'accueil comme les maisons vertes?  Ou la mise à disposition d'espace de jeux fermés pour les jours de grands froids, de pluie sur le même modèle des plaine de jeux   Ce n'est pas rentable comme activité pour un particulier.  Ou c'est l'autorité qui devrait mettre cela à disposition, exactement comme les plaines de jeux.

    Et partant, lorsqu'il est question de travail, évoquer l'importance du bénévolat.  Remettre cela à l'ordre du jour, valoriser le travail bénévole.  Pas pour avoir une ligne de plus sur son cv, bien sûr.

    3.  un mot sur les conflits d'intérêt et sur la transparence des experts. Quand je vois les mesures lamentables qui sont prises...j'en pleure: http://www.afsca.be/comitescientifique/avis/_documents/AVIS03-2013_FR_DossierSciCom2013-02.pdf

    4.  Pour la santé, un mot sur les maisons de naissance et les accouchements à domicile.  J'ai aimé le point sur le i concernant la santé.

    6.  Pour l'enseignement, dommage que cela ne fut pas plus étoffé.  Et un mot pour renverser la présomption de culpabilité des gens en IEF. 

    7.  Une mesure claire sur les emballages.  A côté de l'obsolescence programmée.

    Bref, j'imagine que tout le monde aura son mot à dire. Certains aspects me paraissaient très précis, alors, sur ces points-là, j'aurais aimé un "engagement" aussi fort. 

    8.  J'oubliais, un mot clair sur les habitats groupés et l'intergénérationnel (oui, ce mot est à la mode, je sais).

    24
    L. CheriP
    Vendredi 31 Mai 2013 à 22:06

    Je suis adepte comme mfi du changement par contagion de proche en proche. Mais aussi du groupe de pression à un plus haut niveau, même si c'est très dur de sentir l'effet positif je trouve. J'ai été activiste greenpeace pendant quelques temps, car c'est ce qui se rapprochait le plus de mon idée de groupe de pression avec en plus, un certain plaisir à participer aux actions, à se retrouver entre activistes, un peu scout comme ça avec des défis. C'était gai et j'avais l'impression que le mouvement pouvait réellement faire pression. Plus qu'un petit groupe qui a "juste" des idées...? je ne sais pas. Greenpeace évidemment passe plus de temps sur les actions par rapport à de gros problèmes environnementaux que sur des changements de société. Mais j'aimais bien leur manière de faire, iconoclaste et super bien organisée. Je m'y suis sentie plus à l'aise et plus "utile" que dans n'importe quel rassemblement purement idéologique/politique (Mpoc, écolo,...) ou j'avais l'impression personelle de beaucoup de blabla désincarné. Et je ne parle pas de la science... après plusieurs années comme chercheure dans le domaine du réchauffement climatique et même après que le dernier article que j'ai co-écrit soit cité plusieurs fois dans le dernier rapport du GIEC, je n'ai l'impression que de participer à une sorte de mascarade bien huilée (c'est mon sentiment, je pense que certaines recherches sont tout de même utiles - mais moi ça ne me procure pas un sentiment d'utilité - pourquoi en ai-je le désir d'ailleurs, de me sentir utile?). 

    Aujourd'hui, ça reste le concret comme les gasap, le SEL (je voudrais commencer), rouler à vélo qui a mes faveurs. Et le changement en profondeur (pas juste dans les comportements) des gens. C'est pour ça que je suis devenue shrink. 

    Ceci dit je remercie ceux qui inventent et promeuvent toutes ces idées et mouvements, car ils ont réussi à me toucher et à me faire réflechir, à me faire changer, à me faire agir. A chacun de trouver la manière de s'investir qui lui convient (on est pas tous taillés dans le même bois et faits pour le même genre de réflexion/action).

    25
    MarcDS
    Samedi 1er Juin 2013 à 00:03

    Den, des tas de points restent à développer, et la porte est grande ouverte à ceux qui veulent apporter leurs idées pour transformer les lignes de force en un véritable programme. Tu as de bonnes idées, viens les défendre! De plus tu rééquilibrerais un peu un groupe que nous trouvons trop masculin (j'espère qu'en disant ça ça ne freinera pas tes lecteurs masculins qui voudraient s'investir).

    Nous avons volontairement démarré avec un texte incomplet afin de permettre à tous ceux qui veulent un réel changement de cap sociétal d'apporter leur pierre à l'édifice. Un nouveau projet de société ne peut se construire qu'en rassemblant et non pas en opposant, d'où le refus d'entrer dans la logique de parti politique.

    C'est vrai que le groupe de base du R est en toute grosse majorité issu du mpoc. C'est en constatant que celui-ci peinait à décoller à cause d'une structure interne beaucoup trop lourde que certains ont opté pour une autre formule et que l'idée a germé d'utiliser la période électorale pour exprimer notre vision de la société (ce que le mpoc n'avait pas l'intention de faire, du moins dans l'immédiat, malgré la présence du mot "politique" dans son nom). Personnellement, ce qui m'a convaincu alors qu'au départ j'étais plutôt réticent à l'idée d'aller aux élections, c'est la certitude que le R n'accepterait jamais d'entrer dans une coalition avec un parti qui ne remettrait pas en cause le dogme de la croissance.

    Pour le revenu de base, en fait le mpoc avait déjà constaté en l'étudiant que le sujet était très complexe. Tout est dans la manière de l'appliquer, et c'est ce qui fait par exemple que des partis de droite étudient aussi la question. L'idée n'est donc pas rejetée mais demande d'être solidement travaillée.

    Comment apporter sa pierre à l'édifice de R? Tout simplement en te faisant membre effectif, un formulaire est prévu à cet effet sur le site. (Je sais, ça fait un peu retape , mais c'est parce que je m'attends à ce que tu me poses la question!)

    26
    MarcDS
    Samedi 1er Juin 2013 à 00:23

    @L. CheriP

    Je suis moi aussi convaincu qu'il faut commencer par se changer soi mais que ça ne suffit pas, et même si la population est totalement désabusée et déçue par la politique il n'en reste pas moins que celle-ci est indispensable pour organiser la société, et que tout changement, à moins de passer par un bain de sang (ce qui ne saurait manquer d'arriver si on ne change pas de cap) doit passer par elle. La politique dans son sens noble n'est rien d'autre que l'art de vivre ensemble!

    Nous avons comme autre point commun que j'ai moi aussi milité au sein de Greenpeace pendant quelques années, non pas comme activiste mais comme animateur bénévole. Je suis ensuite entré à l'Assemblée Générale et j'y suis toujours, mais après avoir initié le débat sur le positionnement de Greenpeace par rapport à la croissance économique je commence à piaffer d'impatience, car malgré que l'objection de croissance y soit de plus en plus prise au sérieux je constate qu'au niveau international (où les décisions se prennent quant aux orientations de l'organisation)  ça n'avance plus beaucoup. La grosse crainte de l'organisation est de faire fuir une grande partie de ses membres alors qu'elle dépend entièrement d'eux financièrement. Mais en restant fixée sur la protection de l'environnement sans attaquer le problème de l'exploitation économique des ressources terrestres au-delà de ses capacités, je pense que l'organisation est engagée dans une guerre perdue d'avance même si elle peut encore gagner des batailles.

     

    Sur ce,

    27
    Lundi 3 Juin 2013 à 10:39

    L. CheriP, c'est quoi shrink?

    28
    Mardi 4 Juin 2013 à 23:29

    Marc, j'avais tout de suite tiqué, et j'ai failli rajouter un point relatif à la présence des femmes dans toutes les initiatives de ce genre, et dans la société de demain (et d'aujourd'hui) de manière générale.
    Quant à ton invitation, pourquoi pas?  Je me tâte. Pas envie non plus de me disperser.

     

    PS du 6 juin: je dois arrêter d'écrire tard, je fais alors des fautes grammaticales incroyables!

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